Sous une lune rouge sang... [Terminé]

[édition : mise en page suite à un copié/collé foireux, peut-être qu'un jour je comprendrai]
Son destrier noir se cabra. Soudainement. Violement. Et sans raison. Jettant Accolon au sol, sur le tapis de feuilles mortes encore humides malgré qu'il n'ait plus plu depuis la matinée. Le Chevalier n'eut pas le temps de réagir, ni moins d'amortir sa chute, et la forêt se voulait plus traître que lui en ce début de soirée, lorsque qu'une racine agrippa sa cheville gauche dans sa chute. Accolon s'étala la tête la première sur le sol, et se releva aussitôt. Scruter les environs. Etre à l'affut.

Le Chevalier chancela. Bordel. Quelque peu sonné par la chute. L'entorse à sa cheville gauche était encore trop chaude pour le faire souffrir, mais il sentait sa jambe plus faible qu'à l'ordinaire. Nouvelle légère perte de connaissance. Prends appui sur tes jambes, reste éveillé ! Accolon se mordit la joue pour retrouver ses esprits.
La boue et quelques feuilles mortes se battaient contre la gravité pour rester collées à son visage, alors que le destrier tournait en rond, agité et nerveux. Qu'est-ce qui pouvait mettre son destrier dressé à la guerre dans un état pareil ? La monture noire n'avait JAMAIS paniquée alors qu'Accolon la chevauchait, jamais - ce qui expliquait la chute du chevalier, pourtant bon cavalier et surtout bon dresseur. Accolon n'arriva qu'à une simple et basique conclusion, qui ne le réjouit pas du tout. Dangereux. Ce qui avait provoqué ça était dangereux ! Foutrement dangereux !

Courir à son cheval. Prendre son bouclier. Sortir sa hache. Se mettre en garde. Mince, son casque était de l'autre côté de sa monture, contourner et... non, quelque chose. Une présence. Dans les bois. Quelque part. Accolon se mit en garde, sa hache tenue fermement dans sa main droite et les sangles de son petit bouclier passées autour de son avant-bras gauche.
Il entendait des grognements ? Une bête sauvage ? En avait-elle après son cheval ou après lui ? Réflexion stupide, Accolon ne voulait perdre ni sa vie ni celle de son destrier. Concentre-toi !

Là ! Un mouvement... Disparu.

Craignant pour sa monture, Accolon siffla enfin l'ordre lui permettant de fuir. Malgré sa panique, l'animal avait été assez bien dressé pour rester malgré tout en place jusqu'à ce que son maître lui donne la permission de partir. Le destrier ne demanda toutefois pas son reste... Et la
chose en profita pour sortir des sous-bois, toutes griffes et crocs dehors.

Un loup géant ? Un ours ? Un... non, quelque chose de plus étrange. Pas le temps de réfléchir plus, Accolon se plaça entre son cheval et l'immense prédateur. L'impact serait dur vu la masse et la vélocité avec laquelle ce fichu truc lui fonçait dessus. Le Chevalier était fier de sa carrure, et il savait résister aux chocs.
Qu'importe sa cheville, elle aurait temps de lui faire mal plus tard !

Vous avez déjà été l'enclume sur laquelle un forgeron martèle ? Accolon venait de l'être !

Le traître eut l'impression qu'un taureau entier venait de lui tomber dessus, un taureau qui avait une putain de gueule avec des crocs aussi grands que sa tête ! Et qui claquait de la mâchoire à deux centimères de ses yeux, protégés grâce au bouclier sur lequel la bête avait atteri la tête la première. A moitié tombant, Accolon voulut donner un coup de hache quand il se sentit propulsé en l'air. Coup de griffe. Son bouclier volait dans les airs, Accolon se réjouit brièvement que ce soient les sangles et non son bras qui aient lâché !

Glissant sur le tapis de la forêt, le Chevalier se remettait à quatre pattes pour se relever ensuite.
Bon point, son destrier était loin maintenant.
Mauvais point, le Biclaveret - ! ! ! ! ! ! - était toujours là ! Très très mauvais point !

Respire.

Respire bon sang !

ALLEZ !

Accolon avait le souffle coupé depuis l'impact. Sa vision était floue et il avait l'impression que son crâne implosait à chacun des battements de son coeur. Ses muscles tremblaient quand il se releva péniblement, maintenant que l'assaut était passé l'adrénaline l'empêchait plus d'agir qu'autre chose. Le traître s'énervait tout en tentant de se calmer. Il serait peut-être d'ailleurs temps qu'il lâche le reste du bout de bois qui lui avait sauvé la vie... si jamais il arrivait à desserrer sa poigne un jour !

Finalement, ce fut quand Accoon posa un pied - le gauche- par terre qu'il retrouva son souffle.
- AAAAAAAH ! Le cri de douleur lui avait échappé, mais au moins maintenant il respirait à peu près convenablement. Sa cheville lui faisait un mal de chien. Accolon avala sa salive et grogna. Ignorer la douleur était une chose, mais savoir ne pas pouvoir encaisser une autre charge était un sentiment qui faisait d'autant plus froid dans le dos.

Même étendu par terre et inerte et avec un pieu dans la poitrine, le Biclaveret semblait toujours menaçant. Il avait lu des choses au sujet de ces créatures dans la bibliothèque de Morgane, les armes conventionnelles ne pouvaient pas les tuer. Ce n'était qu'un question de temps avec que la bête ne se relève. Accolon surveilla le monstre tout boîtant jusqu'à sa hache.

Revenu près du Biclaveret, l'amant de la Fée s'agenouilla près de la gueule du prédateur. Il raccouci sa prise sur sa hache, de façon à pouvoir utiliser son bout en metal comme une masse. Le Chevalier crut voir un mouvement et n'attendit pas plus longtemps pour s'ateler au défonçage méthodique de la tête de son agresseur.
La douleur du premier coup sembla réveiller quelque peu la bête, mais les suivants la replongèrent dans le noir.

Une bande d'oiseaux s'envola dans la clarté de la nuit, alors que le martèlement de la hache emplissait la forêt du bruit du brisement des os, du déchaussement des crocs et des giclées de cervelle. Accolon était haletant, les mains et les genoux couverts de sang. Idiotement, il essuya la sueur de son visage d'une main, pour en fait la remplacer par du sang. Tant pis, pas grave, bouge maintenant ! Barre-toi de là !
Le traître lança un dernier regard à la masse diforme qui remplaçait maintenant la gueule du Biclaveret : et merde, déjà des poils repoussaient ça et là alors que des os se réageançaient. Il était vraiment temps de fuir, cela allait agravait la blessure à sa cheville mais Accolon avait des soucis plus urgent. Comme prier pour que le Biclaveret mette du temps à se régénérer.

Le traître estimait avoir mis deux cent mètres entre lui et le Biclaveret lorsque sa vision se brouilla. Il prit appui à un arbre et se couvra la bouche avec son avant-bras. Accolon n'arriva pas à se contenir bien longtemps, et il finit par se plier en deux pour cracher de longues gerbes de sang. La charge du monstre avait du lui briser quelque chose à l'intérieur, il ne savait pas exactement quoi, mais il perdait du sang. Néanmoins, il estimait que ses chances de survie n'étaient pas menacées à court terme. Du moins, avant que le lycanthrope n'attérisse depuis le haut des branches juste devant lui.

Accolon serra les dents. C'était qui le crétin qui avait dit un truc comme "ça sert à que dalle de courir, faut se barrer à point" ? Ce type là avait jamais dû courir contre un homme-loup !
Le Biclaveret avançait ses quatres pattes sur le sol, tel le prédateur qu'il était jaugeant sa proie, alors que les os de sa machoire craquaient encore pour se remettre définitivement en place.
La bête approcha une patte, et Accolon recula d'un pas.

Accolon n'était pas le genre d'homme à renoncer devant un problème.
Le Chevalier était plutôt du genre à essayer de les résoudre, et le
fait est qu'il y arrivait le plus souvent.

Ce début de soirée commençait néanmoins à être agaçant : tout d'abord
un "problème" un peu plus gros - et plus griffu, plus enragé, plus
régénérant, plus lycanthropique ! - que les autres qu'il gérait pour le
moment assez habillement selon l'auto-estimation de son dernier lancer
de hache, mais maintenant un mur sorti de nul part ! Et impossible de
le contourner tant les bords du sentier étaient touffus et
impraticables, pour un humain du moins.

L'amant de la Fée était grand mais loin d'être élancé, et l'escalade n'avait jamais fait partie de ses occupations favorites. Accolon savait qu'il arriverait bien à monter, il y avait vraiment assez de prises pour cela, mais avec sa cheville en mauvais état, en combien de temps arriverait-il à la fenêtre ? Si le Biclaveret le rattrapait alors qu'il était en train de grimper, il n'aurait strictement aucune chance.

Accolon se rendit compte qu'il avait déjà commencé à grimper alors qu'il était perdu dans ses calculs de probabilités. Il n'aimait pas vraiment remettre son sort entre les mains de la chance, mais il aurait temps de maudire les dieux ensuite.
Ou pas.
Pas besoin en fait. Le traître lança un sourire par-dessus son épaule en se laissant glisser par la fenêtre : le Biclaveret s'était relevé et avançait, mais il était encore loin sur le sentier.

L'intérieur de la bâtisse prouva à Accolon qu'il se trouvait dans une chapelle, une très vieille chapelle. Les autres murs étaient à moitié effondrés et seule une partie du toit subsistait... Accolon ne trouverait pas refuge ici, le Biclaveret pouvait y entrer trop facilement. Les bottes du Chevalier allaient attérir sur une pierre lorsqu'il sentit que quelque chose avait attrapé sa main qui tenait le rebord de la fenêtre.

Il fut tiré d'un coup dans les airs, alors que des grognements bestiaux se faisaient entendre de l'autre côté du mur. Sa tête heurta le montant de l'ouverture et il arriva tant bien que mal à bloquer sa position tandis que le loup-garou continuer de lui arracher le bras en tentant de le faire passer par l'ouverture.

Accolon était royalement énervé. Le grand méchant loup avait parcouru 50 mètres et grimpé 10 autres (non en fait, il n'avait rien entendu de tel, il avait SAUTE à 10 mètres de hauteur !!!) en seulement 2 petites secondes ?! Ca défiait toute logique !
L'épaule du traître craqua légèrement, et il sortit la dague qu'il gardait à sa ceinture. Pour la plonger violement dans la chair qui se trouvait de l'autre côté de la fenêtre. Encore et encore !

Accolon n'avait aucun moyen de savoir si sa tactique avait le moindre effet, tandis qu'à l'inverse il ressentait très bien son épaule se disloquer petit à petit. Il frappa. Encore et encore ! Et le Biclaveret tirait toujours plus fort. Sa dague avait du mal à se planter quelque part tant elle était poisseuse de sang. Encore et
RAAAAAAAAAAAAAAH !
Bravo Accolon ! Tu viens de t'ouvrir une longue plaie sur ton avant bras, tout seul comme un grand !
Et encore et encore et encore et encore et encore !

Il ne saura dire ni pourquoi ni comment ni même au bout de combien de temps, mais la prise se relâcha d'un coup ! Et Biclaveret et chevalier tombèrent chacun de leur côté du mur.

Accolon s'écrasa sur des pierres brisées avant de continuer sa chute sur le sol dallé de la chapelle. Qui craqua et qui se brisa. Poussières, dalles et pierres et Accolon chutèrent encore de quelques mètres pour atterir dans une sorte de galerie souterraine.
A moitié sonné, le chevalier cracha de la terre en se dégageant à moitié. Noir total. Et pas question d'allumer quoique ce soit, le traître ne tenait pas à mourir asphyxié. Au moins, le Biclaveret n'allait pas pouvoir le chercher là où il était, vu que le trou qu'il avait provoqué s'était refermé sur lui même.

Rampant sur quelques mètres, Accolon déboucha sur une sorte de long boyau faisant office de crypte. Cela sentait la mort et il marchait (car il pouvait maintenant se tenir à moitié debout) souvent sur des os. Il n'aurait jamais cru que cela arriverait un jour, mais il constata que la cotte de maille et les jambières faisaient de parfaites protections contre les rats !
Accolon eut l'impression de marcher pendant plus de deux heures, quand finalement le boyau se rétrécit et remonta.
Une trappe en bois bloquait une sorte de sortie, mais elle ne résista pas longtemps aux coups du Chevalier.

Une nouvelle chapelle, légèrement en meilleur état. Le ciel s'était mis à pleuvoir vigoureusement, et le toit gouttait en de nombreux endroits.
Accolon se laissa tomber sur le sol et gagna l'un des coins de la pièce. Il se força à ne pas s'endormir maintenant. Prendre l'un des bouts de bois de la trappe et se faire un atèle à la cheville. Aller, un dernier effort.

L'amant de la Fée se laissa envouter par Morphée seul cette nuit là, dans le froid d'une chapelle isolée, fiévreux et blessé, et crachant même encore parfois du sang.

Sujet: Re: Sous une lune rouge sang... [Terminé]

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