Cette fois, Gil-Galad c’était carrément aventuré hors des Bois Elfiques. Il poussait ses petites ballades de plus en plus loin, tout en veillant quand même à ne pas trop s’éloigner. Il n’aimait pas tellement trop s’éloigner, en fait. La Cité Eternelle était son foyer, là où il avait passé son enfance et sa vie, là où il avait développer l’intensité inhabituelle de ses pouvoirs – lui-même n’aurait pas hésité à dire « incomparable, inimitable, inimaginable » – et il l’aimait profondément, se foyer. Il n’aimait pas le quitter sans raison, d’autant qu’il s’y sentait bien. Mais il savait qu’il allait bientôt devoir l’abandonner pour une longue période, et il jugeait préférable d’utiliser le temps qui lui restait pour se préparer du mieux possibles aux épreuves qui n’allaient pas manquer de se mettre sur son chemin, et surtout sur le chemin du Roi Llandon, son respecté Souverain. C’était pour lui qu’il allait se résoudre à voyager loin de l’ombre des arbres millénaires.

En effet, même si le bien de la Nation Elfique et la curiosité naturelle d’un magicien le poussaient aussi, c’était bel et bien sa loyauté absolue à son Monarque qui le guidait. C’était d’ailleurs le cas dans presque tous ses actes. Il avait déjà fait de très nombreuses choses pour lui, des choses qui sortaient totalement de son cadre moral habituel. Ca avait fini par entraîner une sorte d’anesthésie de cette gamme de faculté : celle d’hésiter à accomplir ce qui devait être fait. Cela entraînait qu’il pouvait paraître froid et prêt à tout... Peut être pas à tord d’ailleurs. Autrement dit, il perdait peu à peu ses scrupules pour à peu près tout, mais il s’en fichait. Le Roi lui avait donné l’occasion et les moyens de découvrir et de faire croître sa Magie, jusqu’à devenir le Mage le plus puissant du Royaume... C’était du moins ainsi qu’il le voyait, à tord ou à raison, mais cette certitude n’était pas sans fondement. Il était très bon – même si il ne l’était peut être pas tout à fait autant qu’il le pensait.

Toujours était il que si il voulait se familiariser peu à peu avec le Pays des Humains, il préférait d’abord se cantonner aux forêts. Après cela, il verrait bien... Peut être s’aventurerait il dans les plaines, peut être pas. En tout cas, il attendrait probablement d’être avec la Délégation Elfique pour s’aventurer dans leurs agglomérations. Et il ne risquait surtout pas de s’approcher de leurs « villes », de ces amas de roches grises et froides, dressées là où s’étendaient autrefois des plaines fertiles qu’ils avaient piétinés, ou pire, des arbres qu’ils avaient rasés ! Et ils osaient encore se prétendre civilisés ! Leur soif de conquête dévasterait le monde, notre héros en était certain... Enfin, à supposer qu’on les laisse faire, bien entendu. Le Mage savait très bien que son Souverain n’appréciait pas les Hommes outres mesure, et qu’il n’hésiterait pas à les stopper quand cela deviendrait nécessaire. Et pour cela, il utiliserait son arme la plus terrible : Gil-Galad lui-même.

L’Elfe sourit à cette idée, tout en continuant d’avancer souplement. Ici aussi, les végétaux avaient leurs chants propres, et il pouvait les percevoir. L’harmonie était peut être moins puissante que chez lui, mais cette forêt restait assez peu fréquentée par les Hommes pour qu’ils ne troublent pas la paix... Pourtant, quelque chose troublait tout cela. Souffrance, peur, haine... Le tout émit par un Humain. Il ne tenait pas vraiment à les aider, mais sa curiosité avait été éveillée. Il sorti du couvert de la verdure pour passer sur le chemin, et haussa un sourcil de surprise devant la scène qui l’attendait. Du sang partout, et ce pauvre malheureux, qui tenait son moignon de bras, sa main gisant à quelques pas de lui... Encore leur maudite violence ! Ne pouvaient ils pas tenté de régler leurs querelles de façon pacifiques ! Ou à la limite proprement, quoi... Là, ça avait gicler de tous les cotés. Quitte à l’attaquer, s’aurait été plus simple de lui percer le cœur, non ?

« P...Pitié... »

« Hum ? Quoi ? »

« Pitié... Aidez moi... »

« Oh, ça... Pourquoi pas... Mais dites moi, comment diable vous êtes vous mit dans cette etat... »

Il s’approcha de l’inconnu d’un pas souple. Celui-ci, aveugler par la douleur, ne sembla pas remarquer ce qu’était son interlocuteur.

« C’est... cette garce... Elle m’a ridiculisé. Puis elle m’a fait ça ! Et elle est repartie de son *** de pas tranquille ! Traînée ! »

Laissant l’homme continuer à marmonner des paroles qu’il serait indécent de reproduire, Gil-Galad s’approcha de lui et lui prit son reste de bras, déclanchant un cris de douleur.

« Hum... Je vois, je vois... Ca va être un peu court pour recoller. Tant pis. De toute façon, le soin, c’est franchement pas ma spécialité. »

Il avait prit soin de ne pas se laisser éclabousser par le sang, mais à présent qu’il appuyait, ça risquait de gicler. Pour éviter ça, il chanta rapidement un sort de guérison mineur, coupant le flot, avant d’en entonner un autre, plus complexe, qui accéléra la cicatrisation. Il fini en endormant le pauvre type. Quand il se réveillerait, il se sentirait aussi bien que possible, et serait pressé de retrouver sa « civilisation ». Il l’allongea sur le sol, puis regarda le sentier.

« Une bonne chose de faite... »

A présent, sa curiosité naturelle, que possédait tous les Mages de sa race, ou presque, était éveillée. Regagnant les arbres, il se mit à se déplacer à grande vitesse, usant de toutes ses capacités elfiques et même de sa compréhension des plantes pour progresser à grande vitesse. Quand il estima qu’il avait largement dépassé celle qui l’avait rendu curieux, il revint sur le chemin, et s’allongea, les jambes au travers, assis sur une grosse branche. On ne pouvait manqué de le voir, et on n’avait guère d’autre choix de s’arrêter ou de l’enjamber. Il eu un demi sourire et ferma à demi les yeux, les sens pourtant aux aguets, surtout l’ouie... Il attendait « la garce »...

Ce fut son ouie qui lui apporta la première le signal d’une arrivée, juste avant l’odorat et bien avant la vue, car il ne regardait pas dans la bonne direction. Elle dégageait sans nul doute un parfum différent de celui des femmes de Bretagne, un parfum d’ailleurs. Cela ne fit qu’attiser un peu plus la curiosité de Gil-Galad... Ah, ça curiosité... Il considérait cela comme une de ses plus grande qualité et peut être son plus grand défaut – bien entendu, il n’imaginait même pas un instant que cette place était tenue par l’arrogance et une trop grande estime de lui-même – ne voyant en elle rien de dommageable pour lui. Elle était bien souvent le moteur de ses recherches magiques, un soutient, une poussée, qui l’amenait à aller plus loin, plus vite... Même si il aurait probablement fini par arriver à des résultats à peu près identiques sans elle, car en vérité grand était son amour pour la magie et les arcanes des sortilèges Elfiques.

Il s’attendait plus ou moins à ce que la « dame », si il pouvait dire cela, s’arrête devant lui, interloquée, intriguée, ou peut être effrayée, voir frappée de respect et de crainte. Il n’imaginait pas que quiconque puisse ignorer sa puissance, sa prestance et sa grâce typique de sa race. Il n’avait pas la bonne tournure d’esprit pour envisager de telles choses, il avait bien trop de foi en sa propre personne. C’est pourquoi il fût franchement étonné quand la femme se contenta de l’enjamber ! Comme si il n’existait pas, comme si il n’était qu’une excroissance du tronc sur le quel il s’était appuyer ! C’était complètement fou, et elle était complètement folle. La première réaction du Magicien aurait été de lui attraper la jambe, mais il se souvint du pauvre homme qu’il avait croisé quelques temps avant, il s’en abstint. Il n’était pas déraisonnable au point de risquer sa main. Sur sa capacité à lancer un sort avant qu’elle ne porte son attaque.

Son étonnement était si grand qu’il ne pensa pas à une autre solution et la laissa lui passer par-dessus sans rien faire. Il se reprit néanmoins bien vite, alors qu’elle n’était à peine qu’à quelques pas de lui. Il se releva et passa devant elle, marchant à reculons. Sa marche était si « tranquille » que cela ne présentait aucune difficulté. Cette fois sa curiosité était vraiment éveillée. C’était vrai quoi, d’habitude les gens perdaient toute contenance devant les Elfes, c’était neuf fois sur dix « Oh que vous êtes beaux, que vous êtes mystérieux, que vous êtes gracieux ! » S’était parfois exprimé plus sobrement, mais on sentait qu’ils admiraient le Beau Peuple, sa magnificence, et qu’ils étaient tout retournés de rencontrer des êtres qui pour eux faisaient partie des légendes... Mais peut être celle là ne connaissait elle pas ses contes... Elle avait cette odeur d’autre part qui lui faisait se demander d’où elle pouvait bien venir, si c’était un lieu où l’on connaissait les siens.

Toutefois, même si c’était le cas, ça n’expliquait pas pourquoi elle n’était pas perturbée par la beauté qui se dégageait de Gil-Galad – car même si il n’était pas le plus beau des membres, et de loin, il l’était bien plus que les simples humains – c’était même plus étrange encore, puisqu’elle aurait alors dû être surprise ! Oui, pas à dire, il était intrigué... Mais il n’obtiendrait pas de réponse en continuant à la regarder en marchant à reculons et en faisant confiance à son instinct pour ne pas s’étaler dans la poussière... Ce qui aurait grandement gêné son sens de la superbe.

« Salutation, jeune fille. C’est vous qui avez amputé cet homme, là bas sur la route. »

Il fit un signe de main vers l’avant – son avant à lui, donc son arrière à elle – un peu vague peut être pour se qu’il évoquait.

« Et au fait, qui êtes vous ? »

« Ano hito wa kougeki ! »

A ouai d’accord... Vu comment la réponse avait fusée, elle devait être sincère, ou au moins spontanée, mais elle ne fournissait pas beaucoup d’information à Gil-Galad, vu qu’il n’avait pas comprit le moindre mot ! Une chose était sûre : elle n’était vraiment pas une Bretonne ! Pourtant, elle était bien humaine... Elle devait venir d’au-delà des flots...

« Cette homme attaquer Hana ! Kami défendre Hana ! »

Et bien, elle avait des notions de la langue du pays, ce qui était bien, par ce que ça lui facilitait la tâche. Il se demandait quand même qui était Hana, puisqu’elle elle était visiblement Kami – après tout, elle portait une très jolie épée, sûrement bien pratique pour tranchée les mains inopportunes – toutefois, il n’allait sûrement pas tarder à la savoir.

« Moi Ha... Kami Katanaga ! Moi venir Soleil Levant ! Et vous Shounen ? »

Apparemment, c’était elle Hana, vu la façon dont elle avait hésitée. C’est tout du moins ce que notre héros en avait déduit. Mais elle préférait qu’on l’appelle Kami Katanaga et disait venir du Soleil... Il fronça un bref instant les sourcils en se demandant si c’était possible. Après tout, il avait déjà entendu parler de choses plus invraisemblables que des êtres venants de l’Astre du Jour en s’incarnant dans une forme humanoïde, et il en avait même vu de presque aussi incroyables. Quelque chose lui revint vivement à l’esprit, comme souvent dans ses réflexions compliquées – pour ne pas dire tordues – qui caractérisaient son mental, et qui n’étaient peut être pas pour rien dans sa rapidité d’incantation, si ce n’était dans la puissance de ses sorts. Le Mage surpassait en effet la plus part de ses confrères dans ces domaines, et cela avait grandement contribué au développement de son incroyable estime de soi. Il lançait des sortilèges plus rapidement et avec plus de force.

Pour en revenir à l’idée qui lui vint, il se dit soudain qu’elle devait parler de l’Extrême Est, là où se levait le Soleil. Oui, il était bien plus logique de conclure qu’elle était une Humaine venue d’une lointaine contrée, car elle n’avait franchement pas l’allure d’un être surnaturel. Ce fût à se stade de ses pensées qu’il se rappela qu’elle avait posé une question en réponse à la sienne. Il lui arrivait assez souvent de se focaliser sur le début d’une phrase pour revenir plus tard à la fin, et même ici, cela ne se remarqua pas, car sa réflexion quasi-fulgurante n’avait prit que quelques instants.

« Mais il est vrai que j’ai oublié de me présenter. Excusez moi, cela m’arrive souvent... Je me nomme Gil-Galad, Gil-Galad Vorondwë. »

Il s’inclina légèrement avec grâce, le tout en marche arrière et en lui faisant un léger sourire, à peu près autant par automatisme que par amusement.

« J’occupe la fonction de Mage du Roi Llandon. Il est le Souverain des Elfes. Car, bien entendu, je suis un représentant du Peuple Elfique. »

Cette fois, se fut sa tête qu’il inclina légèrement. Il avait précisé la fonction de son Roi, car il ne pensait pas que cette femme pût la connaître.

« Par contre... Hum... Je dois bien avouer que je ne connais pas la signification de se terme... « Shounen »... Un drôle de mot... Peut être pourriez vous m’éclairer, jeune fille. »

Lui aussi considérait en effet son interlocutrice comme fort jeune par rapport à lui, puisqu’elle n’avait pas l’air d’avoir dépasser la vingtaine de beaucoup.

« Gir-Garad... Pas ningen... humain... très jolie ! »

Bon... Elle avait comprit qu'il n'était pas Humain, c'était déjà ça. Et qu'il était très joli ? Donc très beau ? C'était un compliment, ça ? Mmmh... Après une courte réflexion intérieur, il décida que oui, c'en était un. Elle ne maîtrisait pas tout à fait la langue du pays, donc on allait pas lui demander de faire dans le « Oh créature sylvestre, que votre magnificence touche mon âme mortelle jusque dans ses tréfonds les plus enfuis ! Que votre grâce m'illumine et me rend humble ! Et reprenez donc une tartine de miel ! », non plus...

« Sorcier du Shogun... belle position sociale. Erfes ?? Erufu ! Peuple mystique oui ?? »

De mieux en mieux... Bon, dans sa culture, « Shogun » ça devait être le Roi... Et il allait pas chippoter sur une question de subdivision des praticiens de la Magie, hein ? Il se contenta donc de hocher la tête pour répondre à sa question. Oui, on pouvait largement les dire mystiques, pas de problème là-dessus !

« Shounen... heu... homme jeune... pas barbes encore ! »

« Shounen » c'était donc un jeune homme... Oui, bon, il n'était pas vraiment « jeune », mais ce n'était pas visible pour cette petite Humaine. Elle avait demandé confirmation sur la mysticité des Elfes, donc on pouvait en conclure qu'elle ne connaissait pas le folklore breton, et donc qu'elle ne savait pas qu'elle avait en face d'elle un être à la jeunesse éternelle... Il allait laisser passer ça aussi, pour le moment. Il n'avait pas spécialement envie de lui expliquer toutes ces choses, surtout qu'il ne savait pas encore vraiment qui elle était, à part son nom et l'endroit d'où elle venait. Est-ce que dans son pays les Humains étaient moins réducteurs, laissant leurs femmes porter des armes ? Ou bien était-elle un peu une « rebelle » ? Autant de détails parmi tous ceux qu'il lui restait à découvrir, s'il en avait la possibilité !

Mais voilà qu'ils arrivaient dans une clairière, et qu'elle se détournait de lui pour se diriger vers une casquade d'eau claire et la mare d'eau profonde qui l'accompagnait. Curieux, comme toujours, il la suivit. Et voilà qu'elle sortait son arme, la posait, avant... avant de se déshabiller complètement ! Hum... Ils avaient de drôles de moeurs, dans sa contrée... Se mettre nue, comme ça, devant un parfait étranger dont on savait à peine le nom, pour aller se baigner ! Et en abandonnant son arme, par dessus le marché ! Ne réalisait-elle pas, cette môme, que tout Humain, ou presque, aurait balancé le sabre plus loin pour pouvoir aller profiter d'elle à loisir ? En la menaçant d'une autre lame, où même de la sienne, au besoin, et sans la balancer, bien sûr...

Toutefois, lui n'était pas Humain, et s'il l'observa, ce fût surtout par curiosité, encore une fois. Il n'avait jamais vu d'Humaine nue, en fait, il n'y avait jamais pensé avant maintenant. Elle était bien faite, pour une de sa Race, mais bien sûr ça ne valait pas une Elfe. Rien ne valait la beauté physique des Elfes, d'ailleurs, sauf de rares exceptions... En plus, il n'aurait sans doutes même pas eu le même spectacle en épiant une bretone quelconque, puisqu'elle était étrangère à cette terre. Pas une once de désir en lui, le Magicienne Elfique qui aimait plus que tout la Magie, et qui avait aussi eu quelques amantes parmi son propre Peuple, se qui rendait toute mortelle bien pâle en comparaison... Mais, plus que tout, il avait ce qu'on appelerait plus tard « l'esprit scientifique », pour certaines choses... Ici, en l'occurence, il en faisait preuve.

Mais s'il avait été attiré par elle... Hum... Et bien... Nous dirons qu'il ne se serait pas gêner pour la rejoindre et courir le risque créer un petit hybride, dirons-nous...

« Dites-moi, damoiselle Kami, est-ce votre habitude de vous exiber ainsi ? Ou est-ce une invitation ? »

Ce n'était pas parce qu'il n'avait pas de pulsion qu'il ne pouvait pas la taquiner... Souplement, il s'assit sur une pierre toute proche, la regardant d'un air songeur... Il y avait quelque chose de différent chez elle, définitivement, plus que son origine... Et il allait trouver quoi, foi de Gil-Galad !

Plus cette affaire l'intriguait, et plus il s'amusait... S'aurait pu être étrange, pour quelqu'un d'autre, mais il n'était pas quelqu'un d'autre. Il était lui, Gil-Galad Vorondwë... Ca disait tout...

« Habitude... oui, mais habitude seul... pas souvent compagnie... Kami pas pensé que Gir-Garad san suivre. »

Ouai, pas pensé qu'il la suivrait... Elle voulait qu'il face quoi alors ? Qu'il aille jouer aux petits chevaux elfiques ? Non, il y avait un mystère chez elle, et les mystères, il les perçait. Toujours. Ainsi commandait son insatiable curiosité, son moteur, son souffle...

Pendant ce temps, la jeune femme passait sous la cascade, comme si de rien était. Bon, d'accord, il était un Elfe, et elle n'avait pas l'habitude d'être seule, mais tout de même, c'était bien peu de pudeur pour une fille des Hommes... Cela même rajoutait de l'épaisseur au mystère, et c'était une couche de plus qu'il comprendrait, si nécéssaire, avec le reste...

« Vous sale aussi ? vous parlé invitation, place pour deux... »

Bon, raté pour la taquinerie. Soit elle se moquait de lui, soit elle n'avait vraiment pas grande maîtrise des doubles-sens de la langue que les Humains parlaient en cette terre. Il penchait pour la deuxième solution, bien sûr, sinon il ne serait pas resté tranquillement sur son rocher, il aurait plutôt sévit. Se moquer de Gil-Galad était une aventure bien dangereuse...

Avant qu'il n'ait pu répondre, toutefois, elle revint vers ses affaires, en marchant sur l'eau, l'air pas du tout consernée par l'histoire. Puis elle prit un savon au milieu des vêtements épars et elle retourna à sa cascade par le même moyen. Etonnant, pour une Humaine, mais pas si impressionant que ça, pour un Elfe, surtout un Mage, et surtout lui...

« Sale... Non pas vraiment... Mais voyons où cela nous mène... »

Il se leva, et d'un geste il fût nu, dans toute sa glorieuse nudité. Car son corps était parfait, bien sûr, un corps d'Elfe, aussi puissant que grâcieux. Il s'avança sur le flot, sans y pénétrer, sans plus d'effort qu'elle. Marcher sur l'eau était enfantin. Il y arrivait après quelques semaines seulement. Un tour des plus simple... Mais qui produisait toujours son effet sur les mortels, étrangement.

« Dites-moi, Kami... Qu'êtes-vous ? »

Une question directe, à présent, posée directement. Sa voix se mariait avec le son de l'eau claire, et le chant des oiseaux en contreplant, plus magnifique encore que lui, car il était ce qu'il était, et que de sa voix naissaient des prodiges, se tissaient des sorts. Et ses yeux, toujours, étaient deux océans jumeaux, insondables...

[HRP/Court, mais tu ne me donne pas beaucoup de matière ^^/HRP]

Cette fois, sa question avait portée. Visiblement la franchise payait, ou alors c’était le caractère direct de la phrase qui avait déclenché quelque chose. Peut importait. Cela ne l’intéressait pas, pas pour le moment en tous cas. Ce qui l’intéressait, c’était d’avoir finalement fait sortir Kami de son indifférence jusque-là absolue. Lui, qui ne s’était qu’à peine intéressé aux Humains de Bretagne avant cette fichue histoire de Délégation Elfique lancée par Arthur, ne savait évidemment rien de ceux qui habitaient assez à l’Est pour qu’on les dise « du Soleil Levant », même dans une langue aux raccourcit aussi faciles que l‘était celle des Hommes mortels, eux-mêmes si impressionnable… Il voulait voir jusqu’où allait la réserve de ce peuple encore inconnu de lui…

Il avait trouvé, finalement. La jeune femme s’était figée, le regard fuyant. Malgré l’étrangeté de son Chant, due en partie à son exotisme et en partie à… autre chose, que son instinct lui soufflait mais qu’il ne parvenait point à nommé, il pouvait sentir que les pensées fusaient dans son esprit, avec ce savoir profondément gravé, profondément enfuis, aux racines plus longues et tenaces que celles de sa propre vie. Arrivait-on a un tournant de l’histoire qui l’occupait ? Sa découverte du jour allait-elle tomber le masque, ou bien allait-il donc encore devoir jouer avec elle comme un chat cherchant à débusquer une sourit ? Il penchait, dans la partie de son âme si écoutée chez lui, pour la première solution…

« Je suis un dieu de la mort dans mon pays, shinigami, et toi tu est Gil-Galad Vorondwë, archimage du Roi Llandon, fils de Glovïnd et d’Anäelia Vorondwë ! »

Ce n’était pas la langue, le plus étonnant dans tout ça. Que cette étrangère visiblement mortelle pu connaître le Vrai Langage, le parlé du Beau Peuple, la forme d’expression la plus pure, celle qui se prêtait le mieux à toutes choses et particulièrement à la Magie. Ce n’était pas non plus cette affirmation non seulement de non-humanité mais même de divinité, esbroufe si facile pour les Humains. Ce n’était pas même son regard soudain vieux, plus dur, plus réel. Non, le plus étonnant c’était ces deux noms, jamais prononcés, ou presque peut-être, depuis un bon siècle, car ils étaient morts bien tôt, ceux qui les portaient, comme pour le délier de tout lien, de toute famille qu’il aurait pu avoir et qui l’aurait un jour ou l’autre entravé ou affaiblit.

Un coup partout, ce dit la part amusée de son esprit, si pleine de chaos. Et malgré la surprise véritable qu’il ressentait, ses yeux ne se troublèrent pas un instant, limpides comme deux lacs calmes, plus calmes même qu’en temps ordinaires, car ses pensées courraient dans son crâne, plus vives qu’aucune créature terrestre, sautant, volant, tissant des liens à partir d’écho fantôme, analysant ce qu’il percevait de son Chant, bondissant dans sa mémoire phénoménale, écoutant son instinct dérobant. Et un léger sourire étirait ses lèvres, venu de nulle part et sans nulle destination.

« Les tiens m'ont sauvé et accueillis chez eux le temps que je me remettent de mes blessures... c'était un siècle avant ta naissance. »

Un siècle. Indice jeté au vent et intercepté au vol. Un siècle. Une éternité pour les Hommes. Un court moment pour les Elfes. Un instant fugace pour les géants végétaux qui l’avaient bercé…

« Tu dis vrai. »

Ses premières paroles. Pour poser la vérité, indiscutable. Oui, elle disait vrai. Il le voyait en son Chant et il y avait un écho, un écho… Quelque chose de funeste, quelque chose qui flairait comme le vent, parfois, quand le rire des anges semblait s’y envoler, silencieux. Comme la lune en été, quand d’argent elle chantait l’oubli.

« Tu as croisé le chemin d’une Dame Blanche, d’une Banshee. Et la mort, comme toujours, c’est abattue. »

Il y avait autre chose encore, autre chose qu’il pouvait percevoir, comme on perçoit la pluie et la chaleur du foyer, comme on perçoit le vent et la terre sous ses pieds.

« Alfirin sait ton nom… »

Une part de son esprit courait toujours, cherchant, flairant la moindre piste, le moindre écho, la moindre illusion de correspondance. Son sourire s’agrandit.

« Je vois qui tu es, je vois le spectre du pouvoir, mais par contre… Par la folie de Dagda, comment as-tu trouvé le nom de mes parents ? »

Nulle hostilité, nulle condescendance, nul respect plus grand ou plus maigre. Juste la curiosité. Le moteur et le souffle. Toujours…

Elle avait parue surprise par sa réponse, ou peut-être par le pouvoir qu'elle sous-entendait à elle seule. Bien des gens étaient surprit par l'étendue de ses talents, et nombreux étaient ceux qui, parmi les mortels, avaient payés cette surprise de leur vie...

« Tu doit être plus fort que Elvaël Malwarïon pour être capable de le voir... rare sont ceux -mortel ou non- à pouvoir. Oui j'ai connue la sœur de ta mère, ta tante donc... c'est grâce à elle que je suis ici aujourd'hui, mais c'est une longue histoire... nous seront mieux sous un arbre que sous cette cascade. »

Sa tante... Il n'avait entendu son nom qu'une fois ou deux peut-être. Peu de gens savaient même qu'elle avait été sa tante. Mais il avait lu et écouté les murmures, dans la bibliothèque d'Alfirin... Et elle y était parfois mentionnée... En silence, il emboita le pas à la « jeune » femme, son corps se sèchant et ses vêtements reprenant leur place en deux mouvements de la main.

« Mon père était ambassadeur et fut envoyer ici afin de nouer des relation avec le Roi alors en place à cette époque... j'ai oublier sont nom, cela remonte à 2 siècles environ... et je n'était qu'une petite fille alors... les personnes qui entourais mon père ne m'intéressais pas. Lors de notre retour pour prendre le bateau devant nous ramenez chez nous notre équipage fut stoppé par une bande en maraude, bien plus nombreux et armé que les gardes de mon père... »

Elle était bien froide, mais sa froideur ne touchait absolument pas Gil-Galad... Il avait vu tant de choses... Il avait fait tant de choses horribles...

« J'ai vu c'est brutes dégondé les portes de l'attelage à coups de haches... sortir mon père et ma mère en les faisant volé au sol alors qu'un autre entrais et me soulevais de terre pour me sortir à mon tour... ma mère fut violé devant nos yeux alors que mon père était découpé vivant car il ne voulais pas leurs donnée le moindre sous... la moindre pierre... le reste ne peu être décrit... cela gâcherais votre langue. »

Une histoire banale... Il devina que c'était à cet instant que la Dame Blanche était passée, comme toujours, accompagnant la mort, spectre de Sidh...

« Avant de mourir je pu voir votre tante mettre fin à la vie de ces pourceaux et s'approcher de moi... tous ce que je me souviens après ça c'est de m'être réveillez dans une cabane... Une elfe apparu alors dans l'encadrement de la porte apportant des onguents et des cataplasmes, ainsi qu'une mixture infecte à boire... Plus tard lorsque je pu me levez et sortir je pu faire réellement sa connaissance. C'était la première fois que je rencontrais des elfes... et que je me trouvais dans une de leurs villes... »

C'était déjà bien moins banal... Il savait une partie de la trame. Il pouvait deviner une partie de la suite... Il était ce qu'il était, après tout. Ca voulait dire tellement de choses !

« Lorsque je pu sortir de la cabane sans éprouvé de vertiges je découvris la magnificence de l'architecture elfique et croisais d'autres elfes que votre tante... Leurs regards en disais long sur leurs sentiments à mon égards... très peu nombreux était les humains à venir. Étant devenue orpheline je fut adopté par Elvaël, ce qui suscita la désapprobation général, et seul vos parents lui parlais encore... c'était des gens bien... j'ai été attristé d'apprendre leurs morts. »

Pas lui... Pas vraiment... Leur mort était un motif ancien, un des fondements de sa vie. Il était orphelin depuis très longtemps, et la peine s'était effacée... L'histoire déroulait ses méandres, complètant les vides...

« C'est grâce à eux et à votre tante que j'ai appris votre langue, mais cette dernière était mourante... plus tard j'appris que c'était un effet secondaire de mon sauvetage, et elle nous quitta durant l'hiver. Les elfes en profitèrent pour me chassé, et ce fut la dernière fois que je vit vos parents... Je partis alors sur les chemins... âme errante. Me retrouvant dans une ville portuaire j'en profitais pour embarqué sur le premier navire faisant voile vers le levant... »

Elle s'interrompit pour sortir une bouteille de son sac et en boire une bonne lampée. Elle était décidément bien Humaine malgré tout ce qui était tramé en elle...

 « C'est du Saké, alcool de chez moi, je suppose que vous buvée ? »

« Je bois, en effet... Mais pas maintenant... »

Il la scruta attentivement, de son regard aux tourments d'océan... Et avec bien plus que cela, comme de bien entendu...

« Vous avez dit la pleine vérité... J'avais entendu parlé de votre histoire – les arbres murmurent... Je n'imaginait pas rencontrer l'ultime relicat du pouvoir de ma tante... Voudriez-vous quelque chose de moi que vous la racontiez ? »

Certes, croire qu’on pouvait attendre quelque chose de lui pour si peu aurait été pure folie, mais les mortels, bien souvent, étaient fous… À leur façon mortelle, bien entendu, qui n’avait que bien peu avoir, pour ne pas dire rien, avec sa propre folie. Une folie d’Elfe, une folie de Mage, sa folie à lui, Gil-Galad Vorondwë, qui était les deux et bien plus encore…

« Pourquoi voudrais-je quelques chose de vous ? Si j'ai appris une chose en deux siècles d'existence c'est que tous est éphémère... sauf l'acier ! »

Peut-être que celle-ci n’était pas aussi folle, où pas de cette folie-là tout du moins… Quoi qu’elle doive porté une certaine folie en elle pour tirer une arme en disant cela, même avec des gestes lents et naturels. Quoi qu’elle soit du reste, elle n’était que bien peu en face de lui.

« C'est, avec la roche, la seul chose à vivre plus longtemps qu'un arbre ou un Eldar. »

Un Eldar… Encore un mot pour dire « Elfe » ? Quelle étrange idée ! Et quelle étrange idée que de croire l’acier, ou même la roche, plus durable que les siens. Que disait-elle donc là, cette jeune femme - il ne parvenait pas à penser autrement, n’aillant même pas essayé d’ailleurs - qui s’était reposé parmi les siens ? Les arbres et leurs fidèles compagnons étaient bien plus tenaces…

« Vous m'avez posé une question, aussi y ai-je répondu... n'est-ce pas ce qui s'appel faire preuve de civilité ? »

Sans doutes, sans doutes, mais il savait bien peu lui-même de civilité, à part ce qu’il voulait bien savoir. Il était ce qu’il était, et il envisageait bien des choses, derrière les lacs clairs et limpides de ses yeux, qui n’avaient été troublés ni par la sortie de la lame, ni par sa remise au fourreau, bien que son esprit note l’écartement de cette folie-là aussi… Pour un temps tout du moins…

« Je me rend à Cardiff ! Peut-être pourriez-vous m'indiquer le plus cours chemin ? »

Son rire s’éleva à ses mots, cristallin comme une source d’eau clair dans les montagnes, aussi profond que les racines de la terre, aussi vif que vent tourbillonnant.

« Je suis un Elfe. Plus durable que l’acier qui rouille et s’effrite. Plus durable que le roc lentement érodé par les saisons. Aussi durable que l’arbre millénaire, qui ne se nourrit que de l’essentiel et laisse passer les années mortelles. »

C’était une réponse à ses paroles, mais non point une réponse vaine, pour le simple plaisir de répondre, car, aussi fluidement que les gestes d’un sort, distinct mais pourtant unis, elle s’enchaînait avec la suite.

« Que sais-je donc des lieux des Hommes, dont les noms passent comme les feuilles, et dont les lieux-mêmes sombreront dans l’oubli, loin de ma Forêt et de mes préoccupations ? »

Oui, tous les lieux mortels avaient été à des millénaires de ses pensées, jusqu’à ce que cette fichue Délégation le force à se préoccuper d’un d’entre eux… Mais un seulement.

« J’ai peur de ne pouvoir te renseigner… Mais pourquoi veux-tu donc te rendre en ce lieu ? »

La curiosité, encore, toujours, ô oui toujours ! Jusqu’à sa mort, sans doutes, le pousserait-elle perpétuellement sur de nouvelles sentes… Et sa question n’était pas totalement vaine…