La Plaine... Vaste étendue d'herbe qui s'étendait loin, parsemée de creux, de collines et de petits bosquets. Pas d'Humains, du moins pas trop proche, un ciel clair... Oui, finalement c'était sans doutes les conditions idéales pour s'habituer à cette quasi-absence d'arbres. Au moins il y avait la verdure, dont le chant lent et pourtant éphémère transmettait la certitude d'un éternel recommencement, d'une vie succédant à une autre encore et encore... L'herbe était aux Hommes ce que les arbres étaient aux Elfes, à bien y réfléchir, mais ces mortels étaient bien trop inconstants pour comprendre le message qui aurait pu leur être transmit par ces minuscules végétaux... Dommage, car ils auraient sans doutes eu beaucoup à apprendre...

Celui qui songeait ainsi était un homme, perché sur un cheval blanc. Pour être plus exact s'était un Elfe. Il n'avait jamais été un cavalier émérite et n'avait pas plus le temps de pratiquer l'équitation que d'entraîner son propre corps, mais tout comme il était capable de se déplacer avec agilité et de grimper aux arbres par nature, il tenait sans trop de peine sur le dos de l'animal qui avait accepté de le porter et de l'aider dans sa découverte. A vrai dire il se demandait s'il n'allait pas demander à son compagnon de l'accompagner lorsque partirait la Délégation Elfique... Car c'était de cela qu'il était question, encore une fois.... C'était toujours de cela qu'il était question depuis l'annonce de la visite du Roi et de la Reine à Caamelot...

Lui, il irait avec eux, bien entendu. Comment aurait-il pu en être autrement ? N'était-il pas Gil-Galad Vorondwë, plus grand de tous les Mages du Beau Peuple ? C'était tout du moins sa conviction, et il fallait bien dire que s'il n'était peut-être pas le meilleur, car après tout il n'avait jamais eu de raison de se mesurer à chacun de ses confrères pour le prouver, il était certainement un d'entre-eux. Malgré sa jeunesse, il allait rapidité, puissance et efficacité dans les domaines de la Magie, raison pour laquelle le Roi Llandon l'avait pris à son service. C'était même lui qui avait découvert son don, lui qui lui avait donné les meilleurs professeurs pour révéler et faire croître son étonnant talent. Il le servait donc volontiers et avec une grande fidélité.

Tout de noir vêtu, les habits un peu négligés, il était en contraste avec sa monture immaculée et magnifique. Ses cheveux étaient tout aussi désordonnés que le reste de sa personne physique, car il n'avait ni le temps ni l'envie de se détourner de ses études et de ses expériences pour un détail aussi mineur que son apparence. Il avait pourtant la beauté et la grâce de sa race, cultivés malgré tout par une vie passée en forêt dont une partie à errer majoritairement avec les arbres et autres végétaux. Et puis il y avait ses yeux... Des yeux océaniques, qui avaient à la fois la couleur, la profondeur et la magnificence de la mer qu'ils avaient été contempler peu de temps au part avant, et pourtant un peu voilés, d'une brume qui venait de la Magie.

Si le Magicien s'habituait ainsi aux modifications que ses pouvoirs pouvaient subir avec son environnement, c'était pour pouvoir protéger son Roi le moment venu... Il se serait bien passé de tout cela, et il eût un pincement au coeur en se rappelant qu'il aurait pu mettre fin à tout cela en prenant la vie d'Arthur, voir même en s'abstenant de le sauver, là-bas, dans cette chapelle où il avait mystérieusement réussi à se défaire d'un Bisclaveret sans tuer ni être tué... Enfin, c'était trop tard maintenant, et il n'était pas du genre à se laisser aller aux regrets. C'était à son propre Souverain de décider du sort de cet éphémère gêneur, pas à lui, et il était donc condamné à quitter Alfirin pour le cerceuil de pierre et de bois mort qu'était Caamelot...

Au moins il y avait un jardin... C'était déjà ça de pris, et sans doutes y passerait-il tout le temps libre où il ne pourrait pas aller jusqu'à la forêt, au début tout du moins, si la curiosité ne le poussait pas dans cette soit-disant ville pour voir un peu comment vivaient les Hommes tant qu'il y était. Il était sûr que ça finirait par arriver, car la curiosité était le moteur principal de sa vie et la raison de la majorité de ses actes. De ceux que son Monarque n'ordonnaient pas où qui n'était pas purement nécessaire. Sa découverte de la Magie elle-même résultait de sa curiosité, même s'il avait trouvé en elle de quoi le satisfaire pour tout le reste de sa vie, qui promettait pourtant d'être longue, comme l'étaient celles des siens.

Tandis que sa monture avançait doucement, il perçut soudain un chant... Intriguant. Pas Humain, non... Mais pas Elfe non plus. Et bien loin d'être Fomoire ! Il fit pivoter le cheval dans cette direction-là. Le propriétaire de cette mélodie mentale était derrière une colline, que l'animal contourna. Et là il vit... Une jeune femme ?

« Salutation, demoiselle. Pourrais-je savoir qui j'ai l'honneur de croiser dans cette vaste étendue ? »

C'était une entrée en matière moins étrange que « Bonjours, ravis de vous rencontrer, mais... Vous êtes quoi au juste ? »... Du moins il en avait l'impression. L'étalon s'approcha encore de l'inconnue, plus de son propre chef que par un quelconque contrôle de son cavalier.

Gil-Galad ne s'était pas rendu compte qu'un chant physique complétait le chant mental. Jusqu'à ce que le premier se taise après qu'il eût posé sa question. Peut-être parce qu'il avait été aussi intrigant que l'autre. Il parlait de feuille, comme aurait pu le faire un Chant d'Elfe, mais il était différent. Indubitablement différent. Une idée... De vent ? Oui, pour les deux. Et puis autre chose. Il ne pouvait pas mettre de mots dessus, mais il le persevait. Comme beaucoup de choses. Car il était Mage. Il était lui. Il y avait des choses qu'il avait toujours su, que les plantes lui avaient murmurés, que les animaux lui avaient dit, que les arbres lui avaient soufflés, que la forêt lui avait fait savoir. Cela ne l'avait jamais véritablement inquiété, d'ailleurs...

Pour en revenir à sa jeune inconnue, après qu'il se soit révélé à elle – d'un autre côté il aurait cru qu'elle se serait déjà apperçue de sa présence avant –, se mit à l'examiner. Enfin, dans un premier temps elle examina plutôt son compagnon. Son cheval, même s'il n'aimait pas vraiment cette formule. Il n'était pas le maître de l'animal, pas plus qu'il n'était son serviteur. Ils étaient sur un pied d'égalité : l'un se chargeait du transport, l'autre de la protection, de l'itinéraire et aussi du confort. Chacun y trouvait son compte, du blanc étalon et lui, et sa durerait tant qu'ils y verraient tous les deux leur intérêt... Et qu'il pourrait continuer à le porter, bien entendu, car il ne vivrait pas aussi longtemps que l'Elfe, sauf si celui-ci était faucher par une mort violente.

C'était peu probable, aussi cette pensée n'obscurcit-elle pas son esprit. D'ailleurs il sourit en devant son sourire. Elle devait sûrement trouver Astre-Blanc-Qui-File-Dans-La-Plaine-Hors-Des-Bois-De-Lumières-Et-Répond-A-L'Appel magnifique. Il l'était, en fait, et c'était pour cela qu'il l'avait appelé, tout d'abord, avant même de songer à voyager sur lui. Il lui avait demandé de lui faire voir sa beauté de plus près, et l'étalon avait accepté. Visiblement, l'inconnue avait le même désir, car elle avança de deux pas vers eux, toujours sans rien lui répondre. Etait-elle timide ? Prudente ? Ou peut-être ne parlait-elle pas la langue qu'il avait utiliser, celle des Humains puisqu'il était sur leurs terres, à moins qu'elle n'en connaisse aucune. Il n'y avait pas eu de mots dans son chant physique...

En attendant, la demoiselle en question leva enfin le regard vers lui, le détailla attentivement. Elle avait elle-même les yeux havanes, la peau bronzée et était vêtue elle aussi de noire. D'une robe noire. Et dans ses cheveux... De la rosé... Ou pas ? Ca avait l'air différent, sans qu'il puisse dire pourquoi. Du reste elle était plutôt jolie, même si ce n'était pas une beauté Humaine, ni une beauté Elfique... Un peu comme son chant, quoi. Différent, mais pas agressif ou mauvais. Un chant non-Elfe, mais qui aurait presque mérité de l'être. En résumé c'était une personne intriguante et il aimait être intrigué dans pareille circonstance. Elle pencha la tête sur le côté pour mieux l'examiner ou mieux réfléchir... Il la laissa faire en silence, patient comme il savait parfois l'être.

"Je m'appelle Ashaël."

Réponse franche, et il ne décelait nul mensonge en elle. Pourtant ce n'était qu'un morceau de la réponse qu'il espérait, même s'il n'avait pas strictement demander plus. Tout de même, il ne dit rien tout de suite, la laissant continuer à parler. Par contre il nota l'assombrissement de son regard et l'altération de son chant, à un moment. Se demandait-elle ce qu'elle pouvait lui révéler ? Ou bien de vieux souvenirs remontaient-ils ? Certes, elle semblait n'avoir vu passer que très peu d'années, mais il ne la croyait pas Humaine, et donc ça ne voulait rien dire...

"Et vous cavalier, qui êtes vous donc ?"

Question logique, en effet... Il allait répondre, mais fût distrait par son geste. Elle passa une main dans ses cheveux et en retira... Des pierres ? Des glaçons ? Ce qu'il avait prit pour de la rosée en tout cas. Ce n'était pas clairement magique en tous cas, voilà tout ce qu'il pouvait dire... De la rosée crisalisée ? Possible, ça y ressemblait tellement... Mais comment ? Impossible à savoir, mais il allait bien finir par le découvrir.

"J'aime bien votre cheval..."

Elle avait montrée son compagnon de la main en disant cela, après l'avoir regarder en souriant... Ensuite elle rit, et lui il sourit. C'était un beau rire, agréable à l'oreille.

"Mais peut être devriez vous en descendre que j'évite de me tordre le cou à vous regarder de si haut messire."

Le dernier mot avait été accentué, comme si elle était amusée. Mais ce fût à son tour de rire, d'un rire chantant et mélodieux, qui évoquait la forêt éternelle. Ah, comme il aurait été plus épanouis là-bas, ce rire qui aurait alors pu résonner pleinement ! En l'occurance il devait se contenter de voler avec le vent vagabond de la plaine, faisant légèrement relever les oreilles de l'animal... De l'animal qui avait hennit juste après que la femme ait parlé.

« Astre-Blanc-Qui-File-Dans-La-Plaine-Hors-Des-Bois-De-Lumières-Et-Répond-A-L'Appel dit qu'il vous aime bien aussi. Il paraît que vous sentez bon... »

Souriant toujours il descendit souplement du dos de sa monture, avant de le caresser affectueusement. C'était un bon compagnon.

« Quand à moi me voici à votre hauteur. Par contre pas la peine de me donner du « messire », je ne le suis pas vraiment. Je me nomme Gil-Galad, Gil-Galad Vorondwë, pour votre service... »

Il s'inclina grâcieusement depuis la taille, dans l'un des saluts fluides et peut-être un brin exagérés dont il avait l'habitude... Peut-être un reste des bonnes manières de cours qu'on avait essayer de mêler à son apprentissage magique avant qu'il ne commence à stupéfier ses professeurs, qui sait ?

« Comme vous l'avez peut-être deviné, je suis un Elfe. Un Mage Elfe si vous voulez tout savoir, qui a l'immense honneur de servir son Roi et sa curiosité. »

Ce n'était pas une mauvaise présentation de lui, en fait. Plutôt bonne, en fait, vu le peu de mots qui avaient été utilisés pour la composer.

« D'ailleurs, en parlant de ma curiosité, vous, vous n'êtes pas une des nôtres... Mais vous n'êtes pas Humaine non plus... Votre chant n'est pas celui d'un être humain, ni même celui d'un mortel aux jours éphémères... Alors qu'êtes-vous ? »

Bon, voilà, il avait vite laisser tomber les questions détournées. Après tout il était Magicien, pas un fichu courtisan, raison d'ailleurs de son apparence négligée. Ce n'étaient pas de belles tournures de phrases ou de belles parures qui justifiaient son post, mais bien ses talents de Mage.

L'Elfe avait suivit les diverses réactions de son interlocutrice... D'abord était venu un air franchement surprit, ses yeux papillonant librement devant la façon dont il avait nomé son compagnon animal. Il était vrai que pour les Humains une telle façon de nommer les choses pouvait semblée étrange, et d'ailleurs il finirait sans doutes par convenir avec lui d'un nom plus court, mais il aimait généralement bien ces appelations composées, plus complète qu'un seul mot. D'ailleurs comment aurait-il pu l'appeler ? Astre ? Etoile Filante ? Quelque chose de céleste en tous cas, car c'était ainsi qu'il l'avait perçu dès le premier instant, et qu'il n'était généralement pas du genre à modifier ses premières impressions.

Quand à la jeune femme, elle s'était vite reprise, s'inclinant devant le cheval, visiblement en réponse au compliment. Elle lui avait également rendu son salut, quoi que plus légèrement. Non, son autre réaction plus appuiée avait pointé le bout de son nez quand il avait annoncé sa fonction. Il pouvait lire dans son chant sa curiosité, peut-être l'envie d'une démonstration. Il offrait souvent cela, ces derniers temps, et à de simples êtres humains, ce qu'elle n'était définitivement pas. Trop... Différente. Toutefois elle se retint de lui demander quoi que se soit tout de suite, voulant peut-être le laisser poursuivre. Lui, en tous cas, c'est ce qu'il aurait fait à sa place, histoire d'en apprendre éventuellement plus sur son interlocuteur...

Et puis elle avait finie amusée, sur sa dernière question peut-être trop prévisible. Amusée mais pas bavarde, car elle ne répondit rien pendant un long moment, préférant s'approcher d'Astre-Blanc-Qui-File-Dans-La-Plaine-Hors-Des-Bois-De-Lumières-Et-Répond-A-L'Appel pour le caresser avec douceur et précaution. Après quoi elle se rechaussa, comme s'il n'avait pas été là, espérant peut-être lui faire perdre patience, ce qui ne risquait pas d'arrivé, car il savait être patient... Enfin... La plupart du temps... Heureusement c'était le cas aujourd'hui, et elle fini d'ailleurs par lui fournir une réponse, après avoir remit ses chaussures, peut-être un peu à contre-coeur.

"C'est vrai vous avez raison. Je ne suis ni humaine ni Elfe."

Hum... Bien sûr qu'il avait raison. Sur ce genre de choses, il n'était pas près de se tromper. Mais visiblement elle était réticente à l'idée de continuer ses « révélations » - ou de les commencer, question de point de vue – et elle le parcouru encore des yeux comme pour l'évaluer une dernière fois avant de finalement lui dire ce qu'il attendait qu'elle dise.

"Mes géniteurs étaient Sylphe tous les deux."

Tandis qu'elle relevait la tête comme pour le défier de dire quelque chose contre cela, lui levait un sourcil surprit. Une Sylphe... Oui, maintenant qu'elle le disait, il y avait bien une idée de vent en elle, sans compter que cela expliquait la rosée crisalisée dans ses cheveux. Pourtant il était amateur de nuance. Il nota qu'elle avait parlé de ses géniteurs et non d'elle-même. Serait-elle une sorte de Sylphe Grise, élevée au contact des Hommes ? Possible, mais en tous cas elle n'avait pas la noirceur qui caractérisait souvent les Elfes Gris, et donc il décida de la considérée pour l'instant comme une véritable membre de sa race et pas une vulgaire pièce raportée à moitié étrangère, comme l'étaient le plus souvent les Gris à ses yeux Sylvains...

D'ailleurs elle fini par se décripser un peu et par sourire calmement en se laissant tomber par terre, comme pour signifier qu'elle ne croyait pas qu'il serait nécéssaire de le fuir. Par contre elle n'avait pas totalement relâché sa méfiance, il ne s'y trompait pas, aussi ne dit il rien, lui laissant le temps de poursuivre comme elle l'entendrait cette conversation étrange et innatendue... Ce qu'elle fit, finalement, après un long moment où seul le bruit du vent et celui de la nature avait été perceptible.

"Ainsi donc tu es mage, cavalier."

Elle était passé au tutoiement, mais cela ne le dérangeait pas outre mesure. De toutes les races et sous-races du monde, les Sylphes étaient peut-être les seuls que Gil-Galad considéraient comme à peu près égaux aux Elfes. Alors si cela, ou l'utilisation visiblement définitive du « cavalier » amusait cette jeune personne, il n'allait pas l'en priver...

"Et quel est ton domaine ?"

Son domaine... De Magie, voulait-elle dire ? Comme si un être comme lui pouvait avoir un domaine ! Il était Mage, cela disait déjà tout... Il n'y avait rien à ajouter à cela.

"Tu es bien loin des vastes étendu ombragées de la forêt."

Un grand sourire amusé nacquit sur ses lèvres. Elle lui disait ça, elle ? Il était bien moins loin de chez lui qu'elle de chez elle. Pourtant il ne rit pas, car ses paroles suivantes furent plus graves.

"Il y a quelque chose dans l'air..."

Et c'étaient de bien étranges paroles... Prémonitions des Sylphes ? Possibles, mais de toute façon il n'en tiendrait pas compte. Pas sur quelque chose d'aussi vague. Quand à Ashaël, elle semblait presque l'avoir oublié, son chant distrait par le vent et l'horizon. Lui-même resta silencieux un long moment, à l'écoute de ce que lui disait la vie de la plaine, du batement un peu étranger et pourtant toujours familier des existances sous ses pas. Mais ce fût lui qui fini par rompre le silence, d'un ton qui n'était pas vraiment le sien. Ou alors un des siens. Sérieux. Profond. Magique, aussi, mais pas comme on l'entendait d'habitude...

« Pas seulement... C'est dans l'eau et dans l'esprit de beaucoup d'être, aussi. Dans la terre Une rumeur de sang, de guerre et de Magie. Du présent et de l'avenir. Une rumeur de trouble... Du passé aussi. Ainsi sont les voix du monde... »

Rien de plus. Rien de moins. Et cela ne lui apprenait pas grand-chose de précis, car il savait déjà que les batailles entre mortels seraient inévitables. Restait à voir s'ils forceraient le Beau Peuple à les écraser pour se défendre... Le silence revint, qu'il brisa de nouveau, mais de lui-même cette fois. Pas en réponse à un murmure inaudible. Pour reprendre une conversation qui pourrait lui apprendre des choses ou à défaut être intéressante.

« Pour en revenir à se que tu disais, je suis Mage, oui. Bon Mage, et plutôt piètre cavalier, si tu veux vraiment le savoir... Peut-être parce que je suis surtout Mage avant d'être autre chose... »

Son sourire était revenu, léger, et il était lui aussi passé au tutoiement sans la moindre gêne puisqu'elle avait commencé.

« Quand à un domaine, si tu veux parler de Magie, je me suis déjà dit Magicien, et pas qu'une fois. Je n'ais pas de domaine, je suis un Mage Elfe, voilà tout. Je marche sur les chemins invisibles, qu'importe leurs sortes. J'apporte guérison comme blessure, vie comme mort, manipulation comme stabilisation, transformation comme disparition. Je suis Gil-Galad... Je n'ais jamais vraiment trouvé où était ma limite, pour l'instant. »

Encore une fois, ça disait tout en quelques mots. En trop, même, mais elle n'était pas l'une des leurs, donc il ne pouvait juste se résumer à ce que tous savaient. Non pas que ça ait une quelconque importance, d'ailleurs...

« Et je suis assez loin de mon domaine physique, certes, mais pas tant que ça. Au galop quelques heures suffiraient, voir moins peut-être. Je n'ais jamais essayer. L'Île de Sidh se trouve bien plus loin que la Forêt Eternelle, et je supose que nous avons tous le droit d'errer de-ci de-là au grés de nos pas, ou de ceux d'un autre... »

Cet autre, dans son cas, était Astre-Blanc-Qui-File-Dans-La-Plaine-Hors-Des-Bois-De-Lumières-Et-Répond-A-L'Appel, pour l'heure en train de brouter tranquillement un peu d'herbe.

« Mais si tu veux une raison... Disons que je découvre. Que je m'habitue à l'abscence de la Forêt. Parce que j'accompagnerais le Roi quand il quittera son couvert. Et que je n'ais pas l'intention d'être pris au dépourvu, parce que je déteste ça... »

Il avait expliqué tout cela si souvent que c'était venu tout seul. Bien mieux que d'habitude d'ailleurs... Le fait de ne pas avoir affaire à un Humain, peut-être ?

« Et toi, jeune Sylphe ? Que fais-tu dans ces plaines ? Tu découvres peut-être aussi... A moins que tu n'ais pas envie de rentrer sur ton Île, si tu y as jamais été... »

Ou bien un peu des deux... Gil-Galad ne pouvait vraiment le savoir, mais la façon dont elle s'était présenter ne laissait pas de véritable doutes à ses yeux quand au fait qu'elle n'était pas une femme impatiente de rentrer chez elle, dans ce domaine magique qu'était le Sidh...

Encore une fois, il avait noté ses différentes réactions, ses hochements de têtes ses sourires, et également l'assombrissement de son chant quand il avait parlé de l'Île du Sidh... Un léger assombrissement. Elle avait également détournée le regard. Il se demandait de plus en plus si elle avait jamais connu cette contrée magique. Si elle l'avait fait, il était à peu près sûr qu'elle l'avait fuit, peut-être en renégat... De toute façon il n'en avait pas grand-chose à faire de ses origines. Après tout que savait-il vraiment des moeurs des Sylphes si ce n'était ce qu'il en avait lu dans l'incroyable Bibliothèque Elfique d'Alfirin ? Un Elfe qui aurait montré un telle réaction devant l'évocation de la Forêt l'aurait étonné, mais les Sylphes n'étaient ils pas les Enfants du Vent ?

La Forêt était stable, le Vent vagabond. Ils n'étaient donc pas semblable, même s'ils étaient sûrement aussi nobles qu'eux. Et plus pascifistes encore, de ce qu'il savait, car ils n'avaient pas de territoire à défendre hors de l'Autre Monde, et quelle armée aurait pu menacé cette contrée ou même s'y rendre ? Tandis que le Beau Peuple devait parfois protéger ses Bois Eternelles, et donc faire la guerre... Et la gagner, bien entendu, car nul ne pouvait luter avec eux tant en force qu'en intelligence, tant sur le plan des armes que celui de la Magie...

"Tu es curieux cavalier."

Réponse à sa dernière question ? Sans doutes... Et aussi une grande vérité, qu'elle le sache ou non. La curiosité était le moteur d'une grande partie de sa vie, avec les services qu'il devait à son Roi. C'était par elle qu'il avait découvert tant de choses sur la Magie, qu'il avait tant affûté et cultivé ses talents déjà considérables au sortie de sa formation... Bien courte formation car elle n'avait eu nul besoin d'être longue... Elle avait dit ça avec un sourire un peu amère, tout en se levant et en s'approchant un peu du duo que formaient encore cheval et Elfe.

"Les Sylphes ont beaucoup de choses que les humains et toutes autres races n'ont pas."

Tandis qu'elle cherchait de l'inspiration dans le ciel, il haussa un sourcil sceptique. Des choses que ne possédaient pas les siens ? Des choses positives s'entend... Quoi donc, à part la capacité de se changer en courant d'air et en rosée ?

"La sagesse, les dons d'écoute et de compréhension, l'empathie ou encore cette relation particulière avec le vent..."

Elle sourit, peut-être un peu triste, mais lui il rit, mélodieusement, un rire bas quoique réellement amusé. Que savait-elle donc du plus Beau des Peuples pour dire cela ?

"Mais vous avez tant de choses que nous ne possédons pas... Des sentiments, des passions, des affres aussi..."

Les confondrait-elle avec les Humains ? S'aurait été insultant. Ils n'avaient pas tant de passions. Lui-même ne se passionnait que pour son Art... Quand à ses sentiments... Oui il en avait... Parfois. Pas toujours. Pas tous. Et bien peux d'affres, du reste. Son seul regret était se voyage, mais c'était une intervantion des Hommes, et elle serait bien vite oubliée, comme ceux qui l'avait provoqué tomberaient rapidement en poussière...

"Les miens me donnent la sensation de coquilles vides vivant au dépend de ceux qu'ils admirent secrètement."

Des coquilles vides pour les Enfants du Vent c'était assez ironique. Cela dit il comprenait mal ce qu'elle voulait dire, pour le compte. Trouvait-elle les siens trop détachés du monde ? Possible... Sans la Magie et la Forêt il se serait sans doutes ennuyé, mais sans cela il n'aurait pas été Gil-Galad.

"De la même façon que tu sais être un bon mage, je sais être destiné à mieux que cela."

Elle rit et il ne pu s'empêcher de rire à nouveau. C'était déjà beaucoup mieux dit. Si elle se sentait attiré vers la liberté comme il l'était par la Magie alors il était bon qu'elle suive cette attirance. Elle était un être fondamentalement libre, il en était un fondamentalement attaché à sa Magie et par extension à sa Cité qu'il avait toujours aimé et à sa Forêt où il puisait tout ce dont il avait besoin. Ah, qu'il aurait aimé ne pas devoir la quitter !

"Je veux vivre et fouler la terre. Pas seulement la voir se faner."

Une bonne raison aussi même s'il ne partageait pas cette envie. Il ne voulait voir que la beauté de sa patrie et de ses arts... C'était la seule véritable, même si toute cette affaire se révélait intéressante et qu'il n'était pas impossible qu'il finisse un jour par avoir un autre avis...

"Ton roi, de ce que j'ai compris, va sortir de votre retraite. Est ce à dire que les elfes vont prendre part à ces troubles que tu évoquais ?"

Changement de sujet certain, mais il ne faisait sans doutes que suivre le cheminement des pensées de la jeune femme. Du reste il trouvait cette question parfaitement logique pour quelqu'un qui ne connaissait pas la situation, même si elle était un peu naive... Lui aurait-il répondu la vérité si elle avait pu porter préjudice aux siens ? Sans doutes pas, mais ce n'était pas non plus le cas...

« Hum... Je suis curieux en effet, mais toi tu amalgame bien vite les habitants de se monde-ci, il me semble... Les Elfes ne sont pas les Humains... »

Bien sûr il ne répondait pas directement à sa dernière question. Ce n'était pas dans ses habitudes, ça ne l'avait jamais vraiment été, et ça exaspérait parfois du monde... Mais il n'en avait strictement rien à faire. Il était lui-même et ne changerait pas de si tôt...

« Nous avons pour nous la sagesse, la réflexion et l'empathie avec bien des êtres... Nous écoutons les voix des animaux, des végétaux et des lieux, nous leurs répondons. Nous arpentons les forêts mais sommes à l'aise dans n'importe quelle nature. Nous vivons en harmonie et nous aimons la paix avant la guerre. »

En l'occurance il n'y avait ni arrogance ni ventardise dans se ton. Il ne faisait qu'énoncer une succession de faits établits.

« Nous sommes les Enfants de la Forêt, de la Nature. Nous ne les défigurons pas et notre vie n'a pas l'invraisemblabe intensité fugace de celles des mortels. Même si nous avons bien des sentiments, nous aussi... Des sentiments parfois tellement plus puissants et absoluts... »

La Rage notemment. Il ne faisait pas bon de provoquer la Rage de ces êtres si en faze avec les animaux, et aux réactions parfois animales. Quand leurs yeux devenaient rouges... Les fuir était alors le meilleur choix, car leur colère était un ouragan dévastateur.

« Je tenais à fixer cela... Par contre je trouve tes motivations des plus intéressantes et... justes ? Mhoui... Si je n'avais l'Art de la Magie à explorer sans cesse sans doutes finirais-je par vouloir découvrir tout ceci. En l'occurance je n'ais pas vraiment le choix... »

Son sourire se fit légèrement amère un instant mais cela passa bien vite. C'était inéluctable, alors pourquoi user son ressentiment et ses regrets ?

« Car, pour te répondre, nous ne prendrons pas part à la guerre qui vient. Sauf si nous y sommes forcés, au quel cas les mortels veront bien vite que ce n'est pas une bonne idée de s'en prendre à nous, car si notre colère ne s'éveille pas facilement elle ne s'éteint pas facilement non plus, et ils seront anihiler... »

Encore une fois il parlait d'un ton d'absolut certitudes un peu détachée. La présence de trois grands Enchanteurs aussi désunit ne suffirait pas à faire pencher la balance en la faveur de leurs éventuels ennemis... Ou tout du moins c'était là sa conviction...

« Car les Humains d'Arthur recherchent le Chaudron de Dagda qui fût offert aux Elfes avant que les Dieux ne se retirent sur votre Île pour y mourir. D'ailleurs prend garde. Ils interroge généralement les êtres du Sidh, et les dons de ton propre peuple feraient sans doutes un outil bien utile à leurs yeux... Ce n'est qu'un conseil bien sûr... »

Bon, croire pouvoir garder un tel être emprisonné était une douce folie, mais ils pouvaient tout de même être assez gênants, ces Hommes, soit-disant Chevaliers qui ne voulaient soit-disant pas voler ce qu'ils nomaient le « Graal »...

« Nous irons donc à Caamelot, leur cerceuil de pierre qu'ils noment cité pour leur faire comprendre la folie de leurs actes et la nécéssité de les faires cessé... Enfin, le Roi et la Reine iront là-bas pour cela, moi pour les protéger de tous mal magique et user de mes arts comme il sera nécéssaire... »

Torture, meurtres, sorts révélateurs et d'autres choses encore... Cela faisait partie des domaines où toutes les émotions avaient depuis longtemps disparu...

La jeune femme semblait apprécier les émotions. En nourrir son esprit ? Possible, oui... Si cela lui faisait plaisir, après tout, c'était son affaire. Gil-Galad ne niait pas ses émotions, loin de là, mais si elle venait chercher la diversité des Humains en lui elle serait sans doutes déçue la majorité du temps. Il savait la dévotion absolue, celle qu'il portait à ce qu'il était, Elfe et Mage. A sa Race et à son Art. Et aussi à sa Forêt qu'il considérait comme le meilleur symbole des deux et de leur union. Il savait aussi la fierté, celle qui le faisait tenir droit devant les menaces, supléant une quelconque idée de force ou de courage. Cette reconnaissance qui frisait l'arrogance – et qui allait bien plus loin encore même s'il ne voyait pas les choses ainsi.

Et puis il savait tout un pannel d'émotions, bien sûr, mais moins bien. Joie, peur, tristesse, colère... C'était secondaire. Il était Mage, il était Elfe et il était fier. Dans l'ordre. Il avait vu sa réaction quand il parlait de son peuple, et il se demanda brièvement, avec amusement, ce qu'elle penserait de lui s'il se metait à parler de Magie... Car c'était en elle qu'il puisait tout ce qui lui menquait. Si elle venait à disparaître demain sans doutes disparaîtrait-il avec elle et tout ce qu'elle représentait, car il ne pouvait pas vivre sans. Avant qu'il ne fût Magicien il était incomplet et sans but. C'était par les Arcanes qu'il était ce qu'il était, avant tout. Pour cet art qu'il trouvait suprême, il aurait volontiers donner sa vie, son âme, son être...

Son esprit, qui s'était brièvement égaré dans le labyrinthe tortueux qu'était sa psychée, revint sur l'instant présent et sur Ashaël, qui souriait. Pourquoi ? Il n'aurait sû le dire, et de toutes façons ce n'était pas son affaire... Si elle était de bonne humeur, c'était bien pour elle, voilà tout.

-"Haïr la race humaine fait il partit de la sagesse elfique ?"

Un sourcil surprit se leva de nouveau sur le visage de notre héros. Haïr ? Quelle étrange idée... Pourtant elle n'était pas la première à avoir dit cela, Aerin l'avait également évoqué... Haissait-il les Hommes ? Il ne le pensait pas, mais il examina pourtant ce qu'il ressentait à leur sujet. Il y avait un peu de mépris, de la pitié en quantité à peu près égale, de l'agacement de devoir quitter son foyer, de la conscience de leur infériorité et un certain désintérêt de leur fin. Mais pas de haine. Ce n'était pas quelque chose qu'il éprouvait souvent, ou facilement. Et c'était heureux, soit dit en passant...

-"Dans ce cas, pourquoi ne pas les laisser dans leur misère, ou les priver de leur liberté d'action ?"

Les questions s'enchaînaient déjà. Elle présumait de beaucoup de choses, et elle les connaissaient bien mal. Les Elfes laissaient les Humains dans leur misère, quand ils ne s'en prenaient pas à eux ou à leurs biens. Mais ils avaient la courtoisie de leur répondre quand on les solicitaient. Quand à les priver de leur liberté, il y avait songé, un temps, mais ce n'était pas de sa responsabilité, plutôt de celle du Roi. De toute façon, ce n'était pas vraiment dans la nature du Beau Peuple et encore moins dans la sienne propre que de faire pareille chose...

-"Moi je crois que l'être humain à toutes les chances de nous surprendre."

Le sourire de la Sylphe fût petit et énigmatique, celui de l'Elfe bien plus grand et franc. Bien sûr qu'ils étaient surprenant ! Surprenant d'une façon qui pouvait être exaspérante, mais surpenant tout de même... C'était un de leur trais principaux, un de ceux qu'ils partageaient avec sa race quoi que pas dans la même mesure : être imprévisibles, ou pas totalement...

-"Et ce en mal ou en bien d'ailleurs."

Encore une fois c'était une évidence. Les Humains l'avaient déjà surprit positivement et négativement, et ils n'arrêteraient sûrement pas en si bon chemin...

-"Après tout, se sont eux les plus nombreux..."

Bien entendu ! Ils se reproduisaient comme des lapins, et après ils étaient obligés de s'entre-massacrer par instinct d'auto-régulation. Sans leurs guerres sanglantes, il n'y aurait déjà plus assez de place pour eux sur la terre ! Gil-Galad ne voyait pas ça comme la marque de ressources cachées, mais plutôt comme celle d'une bêtise évidente. Les Elfes, eux, savaient se réguler, tous comme les animaux d'ailleurs quand l'Homme n'intervenait pas... Le Beau Peuple n'avait même pas besoin de tuer qui que ce soit pour cela...

-"A quoi pourrais tu bien occuper tes sombres pensées, cavalier, si tu n'avais plus les humains pour les canaliser ?"

Cette question-là par contre était... Stupide. Tellement idiote qu'il éclata de rire pendant que la demoiselle se dématérialisait pour reprendre forme humanoïde un peu plus loin. Comme s'il avait eu besoin d'eux pour occuper ses journées ! C'était une telle abhération qu'il ne vit tout d'abord pas l'intérêt d'y répondre... Pas tout de suite tout du moins.

« La haine, de la race Humaine ou d'autre chose, ne fait pas partie de la sagesse elfique, ni même de la nature des miens... Ou de la mienne. Je ne hais pas les Hommes pas plus que mes frères. J'ai pour eux du mépris, de la pitié et de l'agacement. Car ils ne sont qu'une gêne passagère, dans quelques décénies ils seront morts, et leurs enfants auront d'autres rêves, d'autres occupations vaines... »

Car il était vain de vouloir les pouvoirs de Dagda, et stupide qu'une querelle de famille puisse mener des centaines de gens à la mort ou à la misère.

« Je ne hais pas le loup ou le serpent pour se qu'ils sont, je ne hais pas la mort de venir prendre ceux dont le temps vient. Pourquoi hairais-je les Humains ? Les Fomoires méritent de la haine pour leurs massacres et leur feu, mais pas les Hommes. Ils sont entre la civilisation et la barbarie, même s'ils sont encore plongés dans la seconde sans grand espoir d'en sortir un jour. Haïr une race n'est pas choses à faire, la plus part du temps. »

Certes, comme il l'avait dit, les Fomoires méritaient la haine de certains, voir de tous, eux qui avaient torturés certains des leurs et qui avaient blessé le Roi d'une blessure qui n'avait jamais tout à fait guérie. Mais le peuple qui avait reçu l'Epée ? Non...

« Je peux haïr un homme pour ce qu'il a fait, et il n'y en a aucun que je haïsse ainsi en ce moment. Je peux les mépriser pour ce qu'ils osent appeler une ville, et qui pour moi est une gangue de pierre stérile, coupée de la vie et de la liberté. Là où ils voient leur gloire je vois l'isolement, je vois un monument de mort, je vois les plaines fertiles ou les vertes forêts qui s'étendaient là jadis, je vois la terre mutilée pour en sortir des blocs de pierre, je vois des forêts rasées et des animaux tués en trop grand nombre. Et j'ai pitié d'eux pour tous cela. Par moment j'en rescent même une certaine colère, porté contre ceux qui l'ont érigé et ceux qui l'ont commandée. »

Il y avait encore une fois de l'émotion vibrant dans sa voix, un regret profond de tout ce qui avait été fait pas ces êtres qui semblaient parfois renier complètement la nature qui leur avait donné la vie ! De la tristesse aussi pour ce qui était mort sans vraie raison, à ses yeux.

« Mais je crois que vous ne savez pas ce qu'est la haine des Elfes, ou alors vous ne parleriez pas ainsi. C'est peut-être notre émotion la plus intense et la plus absolue. Quand ça arrive nous sommes les plus terribles êtres que portent cette terre. Si la haine des Hommes était dans le coeur des Elfes, alors il n'y aurait plus d'Humain depuis longtemps, car nous nous serions lancé contre eux dans une vague de rage pure en détruisant ce qui se dressait devant nous. Les Elfes aiment la Paix. Mais la Rage des Elfes aime la Guerre. »

Cette dernière phrase n'était pas vraiment de lui, mais elle reflétait si bien la vérité que son esprit se l'était approprié depuis longtemps.

« D'ailleurs même vous... Si un jour vous croisez un Elfe aux yeux rouges, écartez-vous, partez, fuyez, mais ne restez pas dans son chemin. Nous sommes lents à la haine, mais quand nous sommes vraiment mis en colère et que notre regard rougeoie, alors nous redevenons les Enfants de la Nature que nous sommes, et comme elle nous n'avons plus ni pitié, ni hésitation ni mesure. Encore une fois ce n'est qu'un simple conseil. »

Sur ces derniers mots il avait laissé retombé toute passion contenue pour un calme sourire.

« Pour en revenir à ce que vous disiez, il n'est pas dans notre nature de diriger les autres, pas plus que de détruire la vie quand nous n'y sommes pas obligés. La plupart du temps nous laissons les mortels s'occuper de leurs propres affaires. Seulement cette fois Arthur à demandé à parler du Chaudron qu'il nome Graal, et il cherche à nous le voler. Alors le Roi et la Reine ont décidé qu'il serait mieux de lui faire comprendre par les mots que c'était vain et que ça pouvait finir par être dangereux. Si quelqu'un peu convaincre cette tête de mule de Breton c'est bien le Roi Llandon... Se serait idéal s'il le faisait, mais c'est loin d'être certain. »

Ses épaules se haussèrent dans un geste de fatalisme. Et puis soudain la dernière question de la jeune femme lui revint à l'esprit, et son sourire se fit plus grand.

« Quand à savoir « à quoi je pourrais bien occuper mes sombres pensées si je n'avais plus les humains pour les canaliser », c'est très simple. En fait, ça tient même en un seul et unique mot, si on veut être juste... »

Une de ses mains se tendit, paume vers le haut, et un cailloux vint se soulever du sol pour s'y poser en tourbillonnant. C'était bien peu, mais il n'avait pas voulu faire beaucoup.

« Magie. »

Contrairement à ce que pensaient la plupart des gens, Gil-Galad ne croyait pas tout savoir. S'il avait tout sû, quel intérêt la vie aurait-elle eu ? Non, il croyait savoir beaucoup de choses, et il savait beaucoup de choses en vérité, même s'il lui arrivait de se tromper, comme à tout en chacun, dans ses convictions et ses déductions. Il pouvait être surprit. Et il le fût par l'éclat de rire de son interlocutrice, visiblement incontrôlable. Qu'y avait-il donc de si drôle dans ses paroles ?

- "Gil-Galad..."

Tient ? En était-ce fini des « cavalier » ou bien était-elle trop occupée à rire pour se rappeler de ce petit détail ? Il penchait plutôt pour la seconde solution...

- "Ca ne va pas te faire plaisir. Mais tu as l'air si... Si... Si humain !"

Humain ? Lui ? L'idée était si absurde qu'il éclata de rire à son tour. Qu'avait-il avoir avec eux ? Etait-il Humain parce qu'il avait des émotions ? Et elle, était-elle naive, stupide même, au point de croire que seuls eux en avaient ? Tout être avait des émotions. Elfes, Humains, Fomoires, Selikes, Enfants du Sidh... Tous, sans exeption, de façon plus ou moins modulée. Son prorpe peuple, à elle, avait des émotions, qu'elle le comprenne où pas. Même le plus stoïques des êtres elfiques qu'il connaissait, et il en connaissait, portait ces mêmes émotions. Elle semblait se réjouir de celles des autres, mais par contre ne comprenait visiblement pas que cette réjouissance, se plaisir, était une émotion. Qu'il y en avait une dans son rire...

Jusqu'aux plantes, aux animaux ou aux choses du monde ressentaient des émotions. C'était primal, bien que les leurs soient parfois bien différentes ! Ah, quelle sérénité que celle que transmettaient les arbres à ceux qui les écoutaient, quelle joie que celle de l'eau, quelle optimisme que celui de l'herbe ! Ne le voyait-elle vraiment pas, elle, fille de la rosée et du vent ? Il fallait croire que non, ou alors elle s'arrêtait à peu de choses. Il lui avait pourtant dit l'intensité émotionelle des Elfes par moment ! Les siens, lui comprit, savaient généralement être de marbre, mais là il n'avait pas vu l'intérêt puisqu'elle semblait apprécier cela. De toute façon, niveau comportement social, il n'était vraiment pas un exemple représentatif en tous points...

Et tout ce qu'il récoltait en retour c'était une insulte ! Enfin, elle n'avait pas l'intention de l'insulter, et c'était pour cela qu'il riait, d'un rire puissant et mélodieux, qui fit s'arrêter en pleine course plusieurs petits animaux de la plaine, qui n'était pas plus dénuée de vie que n'importe quel autre lieu. Le dit rire était retombé quand elle le chargea avant de le traversé sous forme de rosé. C'était... Prévisible, mais il sourit tout de même, amusé par son petit manège.

- "Ainsi donc, tes sombres pensées pourraient avoir comme unique focalisation la magie ?"

Notre héros ne prit même pas la peine de répondre tellement c'était évident. Ne l'avait-il pas dit clairement ? Il vivait déjà majoritairement pour la Magie, et il n'aurait rien contre le fait d'abandonner peu à peu tout le reste pour ne se focaliser que sur elle. Il n'avait nul besoin des Hommes pour l'occuper, car il avait déjà le plus complexe des Arts à explorer aussi loin que pourrait le porter son esprit, aussi loin que ses dons le méneraient. Apparemment toujours joueuse, Ashaël disparu de derière lui pour retourner s'asseoir sur sa bute.

- "La magie noire, avec tout ce qu'elle représente, t'attirerait elle, cavalier ?

La Magie Noire ? Question encore plus stupide que le reste, et peut-être même insultante, selon la façon dont on l'interprétait. Mais il choisit de ne pas relever l'affront qu'on aurait pu lire dans ses paroles, car encore une fois elle parlait sans savoir de choses qu'elle ne comprenait pas...

- "Finalement tu as raison, je retire ce que j'ai dit, tu ne semble pas si humain que ça."

Bien entendu. C'était la logique même, mais la façon dont elle releva la tête, son attitude clamant un défis, lui disait qu'elle ne s'arrêterait pas en si bon chemin sur la route des sotises. Non pas que cela le dérange. Elle avait l'air encore jeune, et il ne savait rien des cycles de maturations des Sylphes, qui étaient peut-être bien plus longs que ceux des siens... Elle pouvait bien avoir deux siècles et être encore une enfant pour son peuple, après tout...

- "Mais je crois quand même que s'il ne devait rester qu'une race unique sur cette terre... Si je pouvais donner à une seule race le droit de survivre... Et bien pour le moment..."

Elle marqua une pause, comme pour entretenir le suspense, mais son sourire grandissait déjà de nouveau tellement, encore une fois, la suite était prévisible. Franchement, en l'exprimant comme ça, il n'y avait qu'une fin de phrase possible, même si de son point de vue elle était ridicule.

- "C'est à eux que je le donnerais..."

Et voilà, son rire éclata de nouveau, tant devant l'absurdité de l'idée que devant la transparence de l'histoire ou l'innutilité d'une telle opignon. Comme si cela allait changé quoi que ce soit qu'une enfant préfère les Humains aux Elfes ! Comme s'il s'en souciait, lui, entre tous, qui se moquait bien de l'avis des autres, ses pairs comprit. Il se savait le meilleur, n'aillant aucun besoin qu'on le lui dise. Les seuls avis du Roi lui importaient au sujet des services qu'il lui rendait, la plupart du temps. Parfois aussi des autres pour lesquels il accomplissait quelque chose, ainsi que quelques autres cas, et encore, les siens propres passaient généralement au premier plan...

- "Cependant je t'accord que les elfes ont le bénéfice du doute. Peut être méritent ils plus d'attention."

Cette fois-ci il se contenta de sourire, tout simplement parce que rire sans cesses n'était pas vraiment dans sa nature profonde, bien que ça lui arrive parfois... Pas aujourd'hui, tout du moins pas encore...

« Bien bien bien, reprenons. Je n'ais rien contre le fait que tu me compares aux Humains sur certains plans... Nous avons des points communs, comme nous en avons avec ta propre race. Ne dit-on pas l'Homme entre les Elfes et les Fomoires, le Sylphe entre nous et les anges ? Il n'y a pas une myriade de façon de bâtir une vie consciente, même si les nuances peuvent être aussi diverses que variées... »

Haine, sagesse, vrivolité, folie... Autant de choses qui se présentaient chez certaines races plus fort que chez d'autres, mais que toutes possédaient à un certain degré.

« Par contre je suis heureux que tu ais retirer tes paroles, car même si je ne l'ais pas prit comme une insulte certains auraient pu mal le prendre. Les Humains sont généralement sales, brutaux et expensif dans leur façon de montrer leurs émotions, ce qui est plutôt l'inverse de notre société. Comme je ne suis pas vraiment ni sociable ni sociabilisé, je m'en fiche légèrement, mais bon, tous ne sont pas comme moi, heureusement... »

Certes il n'était pas rustre, mais par contre négligé, avec ses humeurs pafois sombres et irritables qu'on lui passait pour son efficacité. De toutes façon son monarque savait obtenir ce qu'il voulait de lui quelle que soit son état moral, ce qui n'était pas le cas de beaucoup demonde, grand bien leur face ! On venait le soliciter moins souvent pour des broutilles, et il était très heureux comme ça.

« Mais, s'il te plait, évite de parler de « Magie Noire ». La Magie n'est pas « noire » et ne le sera jamais. Elle n'est ni bonne ni mauvaise, bien au-delà de lumière ou de noirceur. Elle est, tout simplement. Il est bien entendu des mots oubliés, pour de bonnes raisons. Des mots dont je ne connais que quelques-uns, que je me suis bien gardé de pronnoncer, et si j'en redécouvre d'autres, je les classerais gentillement dans un coin de mon esprit pour ne jamais les mettre entre des mains qui risqueraient de les utiliser pour suivre les sombres chemins de leurs âmes tourmentées qui pourraient user des Arcanes à de bien mauvaises fins... »

Mais bien sûr, le bien et le mal était très relatif pour lui, le soldat de l'ombre sans hésitations ni scrupules, qui tuait et torturait sans remords... Qui pouvait dire quels mots il jugerait trop sombre ?

« Et il n'y aura nul besoin de m'aventurer sur ces voies-là pour passer le reste de mon existance à travailler sur la Magie. Je n'ais nul besoin d'un autre but ou d'une autre occupation, si tu veux savoir. Je trouve largement mon bonheur dans le premier de tous les Arts, et la longue vie qui s'étale devant moi, j'ai bien l'intention de la passer majoritairement là-dessus. Tu ne comprends peut-être pas... »

Un moue se dessina brièvement sur ses lèvres, bien vite remplacée par un léger sourire flottant.

« Tu sembles aimer la liberté. Les émotions des autres, aussi. Donc les Humains, car ils sont généreux dans les dons des deux. Moi j'aime la Magie. Rien de plus, rien de moins, avant toute autre chose, avant mon peuple ou ma chère Forêt. Je ne veux pas autre chose. Je n'étais pas entier avant d'être Mage... J'étais... Inachevé. Je ne sais toujours pas si tu comprends ou pas, mais je ne peux pas expliquer mieux que cela... L'infini de la Magie est tout se que je me souhaite jamais, et les Humains ainsi que mes devoirs envers le Roi ne sont que des distractions passagères, qui cesseront un jour ou l'autre, fût-ce avec moi. Tant que je serais Magicien j'arpenterais cette terre, quand les Arcanes me quitteront je cesserait d'être et elles continuront après moi... »

C'était une vérité profonde de son être, que ce le soit pour les autres ou pas. Et la dévotion absolue qui brillait dans sa voix surpassait tous ce qu'il ressentait d'autres, depuis qu'il avec découvert son Art, grâce à son souverain. Rien ne l'avait jamais touché plus que cela...

« Tous ça pour dire que les Elfes en général n'en on probablement pas grand-chose à faire que tu leur préfaires les Humains, et moi encore moins que les autres. L'avis des autres ne m'a jamais vraiment intéressé, le mien me suffit ! Si tu aimes les émotions va chez les Hommes, tu seras servie. Nous pourrions lutter, bien sûr, mais pas bien longtemps... Pas avec certaines personnes dans nos rangs, même si certaines autres compensent bien... »

Il y avait parfois des extrêmes, et parfois des liens entre-eux un peu étonnant. Lui se classait plutôt dans la moyenne de ce côté, une fois n'est pas coutume.

« D'ailleurs si vous croisez notre Délégation vous verrez deux pôles opposés... Monsieur le Soldat de Marbre et puis le petit bout en train. C'est vrai qu'en y réfléchissant bien elle est plutôt disparate notre fameuse Délégation, mais bon, ça rend bien au final... »

Même s'il aurait voulu ne pas y être... Mais enfin il n'y avait pas de miracle : qui d'autres que lui le Roi aurait-il pu emmener ?

« Cela dit c'est gentil de nous laisser le bénéfice du doute, je l'avoue... »

Son sourire revint au triple galop, seulement... Et bien amusé, tout simplement. Cette rencontre était distrayante, et ça lui avait donné l'occasion de voir de plus près les capacités des Sylphes, ce qui pouvait toujours être utile, d'une façon ou d'une autre...

Bien entendu, les êtres dits « magiques » pouvaient être bons ou mauvais. Au même titre que les Magiciens, d'ailleurs. Seul la Magie en elle-même était la neutralité absolue. N'était-elle pas l'âme de se monde, son énergie cachée, qui l'animait et qui l'avait peut-être créé ? Les gens qui la maniaient ou qui en avaient en eux, comme les Créatures du Sidh dans les quels s'étaient dissout les Dieux, avaient eux une orientation, car nul ne pouvait être absolument neutre. C'était tout bonnement impossible. Même pour lui. Même pour le Roi. Même pour son peuple. Il y avait toujours quelque chose pour vous tirer d'un côté. Loyauté, curiosité, ambition, dévouement pour sa nation, chaotisme... Toujours...

C'était entre autre pour cela qu'il aimait tant, qu'il admirait tant cet art incroyable et indescriptible qu'était la Magie. Elle était la neutralité absolue. On pouvait même dire qu'elle était absolue, tout simplement... Du reste, il se souciait bien peu de l'opinion d'Ashaël sur ce sujet, comme il le lui avait déjà dit. Qu'avait-il a faire de l'avis des autres ? Dans certains domaines, celui du Roi pouvait lui importer – avoir une grande importance en vérité – mais dans une certaine mesure seulement... Au final, son Art était le plus important. Toujours. Et il adorait en parler !

"Ha ! Cavalier...!"

Elle s'était assis pour lui répondre, et il reporta son attention sur elle, curieux de savoir ce qu'elle pourrait bien avoir à répondre. Il n'avait pas vraiment d'illusions sur les chances qu'il avait de lui faire comprendre le sens profond de tout ce qu'il lui expliquait, mais cela méritait d'être dit. Et puis, qui sait, peut-être cela lui servirait un jour ou l'autre, à cette jeune fille...

"Tu pourrais m'expliquer des heures durant que je resterais ignorante. Tu parles à quelqu'un que ces aspects de la vie n'interessent pas..."

Un sourire flotta sur ses lèvres tandis qu'elle secouait sa tête négativement. Elle finirait bien par ce souvenir de tout cela, un jour...

"Mais je t'aime bien, tu parles bien."

Le compliment – ou tout du moins ce qu'il prit comme un compliment – fût accepté avec une légère inclinaison de la tête, toute en grâce. Il était vrai qu'il parlait bien, même s'il n'avait rien d'un des sagaces réthoriciens que les Elfes comptaient dans leurs rangs.

"Tu sais les sylphes, au cour de leur vie, ont tous l'occasion de rencontrer un être qui pourrait leur faire découvrir les affres de la passion."

Hum... Oui, il avait dû lire quelque chose comme ça dans un de ses grimoires. Les autres peuples étaient loin d'être son sujet d'étude de prédilection, fussent-ils des peuples soit-disant « magiques ».

"Beaucoup, par peur de ce que cela pourrait apporter de désastreux : jalousie, envie, colère... Préfèrent vivre loin du monde."

En gros l'histoire de certains Elfes... Mais seulement des « faibles », à son sens. Il ne craignait pour sa part aucune émotion, il avait une maîtrise suffisante de celles-ci... S'en cacher aurait été une folie, car le moment venu il n'aurait pas sû les gérer...

"C'est de la que vient l'aveuglement que tu t'entêtes à essayer de guérir."

Elle était sérieuse, à présent, mais lui sourit de nouveau. C'était aussi une part de sa nature d'être entêté. Il nomait cela persévérence... Et qu'aurait été un Mage qui ne persévérait pas devant les secrets insondables qui s'offraient à lui ?

"Mon esprit tout entier, malgré lui, est tourné vers cette personne inconnue, tout comme le tiens est tourné vers la magie."

Oui, en fait c'était assez clair. Compréhensible, même... Elle cherchait un but à sa vie, une raison à son être. Mais la Magie était la raison et le but... Pour lui tout du moins.

"Mais toi tu l'as déjà trouvé."

Il inclina de nouveau la tête en signe d'assentiment. Certes, lui il avait trouvé. Grâce au Roi. Raison pour la quelle il était si fidèle à se dernier... Car, ô ironie, la chose qui le tirait loin de la Magie aujourd'hui – pour un temps seulement – était justement née de cette Magie. Comme toutes les choses importantes.

"Tant que je chercherais, rien n'aura plus d'importance. Alors crois moi, ne te fatigue pas à faire de longues et belles phrases. Elles n'ont aucun impact."

Son sourire ne s'effaçait pas, étrangement. S'il avait sû que les Aracanes l'attendaient, jamais il n'aurait laissé quoi que ce soit le détourner d'elle, oh non !

"Un jour on se reverra cavalier... Un jour... Alors peut être j'aurais changé. Peut être même que toi aussi. Nous reparlerons des elfes, de ce qu'ils sont et de ce qui fait l'essence du monde. Des sylphes et de leur civilisation. Des humains et de ce qu'ils représentent. Sans doute trouveras tu la conversation moins... A sens unique."

Elle avait rit, et il n'avait pu s'empêcher de rire avec elle. Certes, ils se reverraient... Sans doutes... Peut-être pas dans longtemps, peut-être pas, mais n'étaient-ils pas immortels ? Quant au reste... Il prendrait sûrement plaisir à discuter de nouveau avec elle, si elle avait vue un peu plus du monde qui s'étendait autour d'eux... Et lui aussi ?

"N'oublis pas cependant, que le plus petit des ennemis n'est pas le plus inoffensif. Si le lion est dangereux, il n'en est pas moins une bête que l'on voit venir. Le virus lui, est invisible et parfois bien plus meurtrier..."

Cette fois, il rit franchement, de se rire mélodieux qui était celui des Elfes, ce rire que la nature elle-même écoutait résonner dans les airs, se rire qui s'épanouissait dans la forêt mieux que nulle part ailleurs, mais qui pouvait aussi cascader dans la liberté de la plaine, comme il le faisait à présent...

« Je te remercie pour ce grâcieux avertissement. Toutefois il n'est pas vraiment nécéssaire... Je ne pense pas un instant que les Humains puissent être une menace sérieuse sur le plan dont j'ai à m'occuper, il est d'autres menaces. Bien d'autres menaces. Je dois protéger le Roi, aussi ma vigilence ne faillira-t-elle pas. J'ai de la ressource. »

Ce qui n'était pas peu dire. Il avait beau être jeune, pour un des siens, il était Gil-Galad. Il ne pêcherait pas par exès de confiance, pas quand tant et tant était en jeu...

« Mais toi, sache que si le microbe est dangereux, s'est justement parce qu'il est discret et insidieux. Les Humains ne sont ni l'un ni l'autre. C'est un danger mineur et parfaitement visible. Néanmoins je sais bien que les petites bêtes peuvent parfois être les plus menaçantes... Mais je te remercie d'y avoir penser. »

Une légère révérence qui n'avait rien de moqueuse. Pourquoi ? Parce que c'était ainsi, tout simplement !

« Quant au reste... Ca peux te paraître étrange, mais je crois avoir comprit ce que tu cherchais et pourquoi. Ta comparaison était fort bonne. Une fois que j'ai sû que mes Arts m'attendaient, je n'ais rien laisser m'empêcher de les apprendre. Trouves donc l'être qui te permettra de t'accomplir, fille du vent ! Et je ne te ferais plus de longs discours... Disons que j'essayerais. J'espère au moins que tu me les pardonneras. »

Il y avait une ironie dans ses propos, une fine ironie, mais sans malice. Il était ironique, la plupart du temps. C'était ainsi, et qu'y pouvait-il ? En admettant qu'il eût voulu changer, bien entendu...

« Et j'attendrais notre prochaine rencontre. Je ne doute qu'elle sera plaisante, et je te souhaite d'avoir trouver ce que tu cherches d'ici là. Mais ne compte pas trop sur un changement de ma part. Je ne change pas... A la limite, je me serais peut-être un peu plus accomplit. »

Tout était dit, lui semblait-il. D'ailleurs, tout en parlant, il s'était approché doucement d'Astre-Blanc-Qui-File-Dans-La-Plaine-Hors-Des-Bois-De-Lumières-Et-Répond-A-L'Appel... D'un mouvement qui aurait pu, par sa souplesse, être celui d'un cavalier plus accomplit que lui, mais qui tenait autant à son appartenance au Beau Peuple qu'à autre chose, il se hissa sur le dos du cheval.

« Adieux, donc ! Et que le vent te garde jusqu'à notre prochaine rencontre. »

Avec – comble de la purérilité, mais quel mal cela faisait-il ? – une pluie d'étincelle lumineuse de toutes les couleurs, il fit partir son compagnon, qui se lança dans une nouvelle course, car il aimait courir, saluant d'un hénissement la jeune femme qu'ils venaient de quitter...